Le Roi de Suède : Bourguiba, Kélibia et une grande amitié à la Tunisie
Stockholm - De notre envoyé spécial, Taoufik Habaieb -
C’est une évocation fort émouvante de la Tunisie, du président Bourguiba et de Kélibia mais aussi un témoignage d’amitié et de soutien que fera sa majesté le Roi Carl XVI Gustav. Dans le discours qu’il prononcera mercredi soir 4 novembre 2015 au Château royal à Stockholm, lors du dîner de gala offert en l’honneur du président Béji Caïd Essebsi, en visite d’Etat, il tiendra des propos qui ont été droit au cœur des présents. La Suède aime la Tunisie, son Roi, le premier. Une amitié qui vaut son pesant d’or. Discours.
Monsieur le Président,
C’est un immense plaisir pour la Reine et moi-même de vous recevoir, M. le Président, et Mme Essebsi, en Suède et au Château royal.
Il y a 52 ans, le premier président tunisien, Habib Bourguiba, effectuait une visite d’État en Suède. C’est mon grand-père, le Roi Gustave VI Adolphe, qui accueillit cette visite.
Bien que les relations entre nos pays aient une longue histoire, le premier accord ayant été conclu dès le 18ème siècle, cette visite d’État marqua le début d’une coopération bilatérale active qui perdure depuis des décennies.
L’amitié entre nos deux pays en fut renforcée. Suédois et Tunisiens apprirent également beaucoup les uns des autres, notamment dans les domaines de la pêche et de l’agriculture. Divers projets d’infrastructure mais également des coopérations tournées vers l’avenir dans des domaines sociaux prirent forme.
Je me souviens très bien de cette visite d’État. En tant que jeune Prince héritier, je pris part à une partie du programme aux côtés de mon grand-père. Trois ans plus tard, au cours de l’automne 1966, j’arrivai à Tunis comme cadet à bord du navire militaire Älvsnabben et j’eus également l’opportunité de visiter la belle ville de Kelibia.
La Reine et moi-même nous réjouissions de votre visite, et, lorsque le comité Nobel norvégien a annoncé il y a quelques semaines de cela que le prix Nobel de la paix était attribué au Quartet tunisien pour le dialogue national, ceci a d’autant plus souligné l’importance de votre visite et nous avons été d’autant plus réjouis à la perspective de vous recevoir.
Le choix du lauréat souligne les efforts pacifiques du peuple tunisien d’aspirer à la démocratie et aux droits de l’homme. En ces temps qui, malheureusement, peuvent être caractérisés par une absence accrue de liberté et par l’instabilité, la Tunisie se démarque comme étant un pays où les conflits sociaux se résolvent par la voie du dialogue et du processus démocratique de décision.
Alfred Nobel était un vrai cosmopolite, un siècle avant la mondialisation. Il n’était pas seulement inventeur, industriel et entrepreneur, il était également un humaniste à l’esprit ouvert. Je suis de ce fait convaincu qu’Alfred Nobel aurait approuvé et partagé notre joie.
La Suède a des traditions humanistes dont elle peut être fière. Notre fort engagement dans le développement de la situation en Afrique du nord et au Moyen Orient s’exprime peut-être d’autant plus clairement cet automne alors qu’un nombre record de migrants arrivent dans notre pays. Je sais que la Tunisie accueille également des centaines de milliers de personnes, notamment des libyens à la recherche d’un refuge loin des conflits. Permettez-moi d’exprimer ma reconnaissance pour l’importante action humanitaire menée par votre pays.
Il est aisé de comprendre que ces personnes se tournent vers la Tunisie, un pays qui sous bien des aspects est empreint de réussite. La constitution moderne avec un ancrage dans les droits individuels pour les hommes et pour les femmes est une référence dans la région et une source d’inspiration bien au-delà de ses frontières.
La Suède souhaiterait être un partenaire et entretenir des liens encore plus étroits avec la Tunisie. Vos efforts visant à combler les écarts dans la société peuvent être érigés en exemple pour beaucoup.
Nous sommes conscients des défis, cependant, la sagesse et l’esprit de consensus dont votre pays a fait preuve ces dernières années sont impressionnants.
M. le Président,
Nombreux sont les tunisiens qui se sont installés en Suède au fil des années et ont contribué à enrichir notre pays. Aujourd’hui, ils symbolisent les milliers de personnes qui se considèrent comme « chez eux » dans les deux pays.
Parallèlement, des entreprises suédoises sont depuis longtemps établies en Tunisie comptant aujourd’hui plus de 5000 employés dans votre pays. Lors de votre processus de développement de nouvelles infrastructures j’espère que ces entreprises, ainsi que d’autres entreprises suédoises, auront beaucoup à offrir. Elles sont nombreuses à bénéficier d’une expérience longue et avérée qui se conjugue avec un esprit de créativité, de qualité et un engagement durable en matière d’environnement.
Je souhaite que la délégation d’entreprises qui vous accompagne puisse tisser des liens solides et fructueux pour l’avenir avec les entreprises suédoises dans divers domaines.
Lors de votre visite en Suède, nous présenterons un éventail de domaines où la Suède et la Tunisie peuvent apprendre mutuellement l’une de l’autre.
Vous aspirez à renforcer la démocratie locale, je sais également que l’égalité entre les hommes et les femmes est une question pour laquelle, M. le Président, vous vous engagez beaucoup.
En Suède, également, nous considérons la participation accrue des femmes à diverses questions d’avenir au sein du développement de la société et de l’activité économique comme étant une priorité majeure. Il s’agit de valoriser la compétence et les opportunités.
M. le Président,
Alors que la mémoire d’Alfred Nobel rayonne sur la démocratie de la Tunisie, c’est une excellente occasion pour renforcer les liens entre la Suède et la Tunisie.
La Reine et moi-même sommes de ce fait extrêmement ravis que soyez, M. le Président et Mme Essebsi, aujourd’hui nos hôtes. Je souhaite que, lors de votre visite, vous puissiez sentir les liens chaleureux et les affinités que la Suède a avec la Tunisie, et je souhaite également que votre visite permette de renforcer davantage les liens d’amitiés entre nos deux pays.
Permettez-moi à présent de lever un verre à votre santé, M. le Président, à celle de votre épouse, ainsi qu’à celle du peuple tunisien.
À votre santé !
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Pourquoi Kélibia? Message subliminal du Roi de Suède? C'est la Suède qui avait financé la construction du port de Kélibia. Au grand dame des Français et de leurs obligés Tunisiens, notamment des polytechniciens. Au moment de la signature de l'accord, les responsables suédois avaient laissée deux cases libres: celle qui précise le taux d'intérêt et celle qui définie la durée de remboursement. Le gouvernement suédois, dirigé alors parTage Erlander, avait laissé au ministre tunisien de l'économie d'alors, Ahmed Ben Salah, le choix des conditions du financement en fonction des possibilités de la Tunisie des années 60: 2.5% sur 25 ans avec un différé de 2 ans! La Suède est un des 3 pays qui ont respecté l'objectif de consacrer 1% de leur PIB à l'aide au développement préconisé par l'ONU. Les relations avec la Suède entrait dans la stratégie de décolonisation par la diversification des échanges humains, économiques et financiers. Les Tunisiens devront faire l'effort de décoloniser leur histoire, de la revisiter de manière objective et critique. Les années 60 n'ont pas connu que "la catastrophe des coopératives"! Comme l'histoire coloniale, l'histoire officielle déforme la réalité, fausse les jugements et empêche la société de s'émanciper et autorise le cirque de ces dernières années.