Décès de Hassine Dimassi : le ministre des Finances qui a dit non
Economiste de renom, doublé de syndicaliste irréductible, le professeur Hassine Dimassi est décédé à l’âge de 77 ans. Nommé ministre des Finances, dans le gouvernement de Hamadi Jebali, le 26 décembre 2011, il prendra rapidement ses distances de l’équipe gouvernementale et remettra sa démission, en juillet 2011. Il expliquera sa décision dans une lettre devenue de référence.
Hassine Dimassi est né le 18 novembre 1948 à Ksar Helal dans le gouvernorat de Monastir.Il est titulaire d'un doctorat d'Etat en sciences économiques (1983) et de l'agrégation en sciences économiques (1984).
Il a occupé plusieurs postes académiques, passant de celui de professeur assistant en sciences économiques à la faculté de l'économie et de gestion de Tunis en 1973 pour accéder au poste de doyen de la faculté de droit et des sciences économiques et politiques de Sousse (1988-1991).
Au début des années 90, Hassine Dimassi a été expert contractuel a ministère de la planification. Hassine Dimassi a également été secrétaire général du syndicat de l'enseignement supérieur à la faculté de l'économie et de gestion de Tunis (1975-1980) et est membre fondateur du parti du mouvement de l'unité populaire (MUP) en 1977.
Il est l'auteur de plusieurs articles et études en langues arabe et française. Ses articles ont porté principalement sur "le chômage en Tunisie", "les activités de promotion de l'économie Tunisienne", "le développement des échanges économiques entre les pays arabes", "la situation financière de la caisse nationale de sécurité sociale en Tunisie" et "les capacités économiques des femmes tunisiennes".
Le professeur Dimassi a élaboré un rapport économique et social dans le cadre du congrès de l'UGTT en 2001 ainsi qu'une étude prospective sur la Tunisie à l'horizon de 2030. M. Dimassi est marié et père de quatre enfants.
La lettre de démission
« Dans une phase très délicate de l’histoire de la Tunisie indépendante, j’ai accepté de faire partie du gouvernement de la coalition actuelle, estimant qu’elle a suffisamment de légitimité pour conduire la deuxième étape de la transition et répondre aux aspirations économiques et sociales exprimées par la révolution, sans porter atteinte aux équilibres financiers du pays.
C’est pourquoi, j’ai cru et continue à croire que ma responsabilitépremière au sein de ce gouvernement consiste à éviter tout ce qui est de nature à susciter un déséquilibre des finances publiques et à exposer le pays aux risques du surendettement.
Mais, et au fil des jours, les dissensions entre la majorité des membres du gouvernement et moi-même se sont accentuées au sujet des politiques financières. Alors que j’étais attaché pleinement à la stabilité des finances publiques, la plupart des membres du gouvernement ont poussé dans le sens d’une orientation politique électoraliste qui a généré un grave et brusque accroissement des dépenses de l’Etat en comparaison avec ses ressources.
Alors qu’il était plus approprié de concrétiser les attentes de la révolution à travers une attention soutenue aux catégories modestes, en renforçant leur pouvoir d’achat, en créant le maximum possible d’emplois productifs, développant les régions intérieures délaissées et en revitalisant l’économie tout en préservant les équilibres des finances publiques, les dérapages se sont multipliés visant essentiellement à séduire les classes sociales en prévision des prochaines élections, à telle enseigne que les dépenses de compensation ont atteint des niveaux hallucinants.
Le projet de loi, récemment soumis au conseil des ministres, relatif à la réintégration au travail et l’indemnisation des personnes ayant bénéficié de l’amnistie générale et leurs ayants droits constitue le dérapage qui a fait déborder le vase. Il aura pour conséquence d'engager des dépenses additionnelles asphyxiantes pour les finances publiques en raison du grand nombre de bénéficiaires et du volume très important quant aux montants des indemnisations escomptées, faisant ainsi peu de cas d'une conjoncture économique et financière bien difficile à laquelle le pays devra vraisemblablement faire face durant les prochaines années.
D’un autre côté, je suis profondément consterné par la manière désinvolte et inique suivie pour démettre le gouverneur de la Banque Centrale, Mustapha Kamel Nabli, ce qui ne manquera pas d’avoir des conséquences négatives sur l’autorité de l’Etat et l’image de notre pays, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, en ces moments difficiles et délicats. Il est regrettable que pareilles pratiques qui ne respectent pas les moindres règles de concertation et de coordination continuent à présider aux décisions. Ainsi, la proposition du nouveau gouverneur de la Banque centrale a été faite sans l’avis des concernés et notamment le ministre des Finances.
Pour toutes ces raisons, j’ai décidé de me retirer du gouvernement et de présenter ma démission ».
Hassine Dimassi
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