Opinions - 04.08.2011

Dégradation de la notation souveraine de la Tunisie: la fin de la récréation

La décision de changer la perspective de la notation souveraine de la Tunisie de « Stable » à « Négative » a sonné la fin de la récréation et nécessite que tout le pays se remette en ordre afin d’éviter de perdre notre « grade d’investissement », précieux sésame pour accéder  aux marchés de capitaux étrangers à coût réduit. Le grade d’investissement se définit par une note supérieure ou égale à « BBB-» et la perspective indique la direction potentielle de changement de notation dans un horizon de 12-24 mois. Une perspective négative indique ainsi une possibilité de dégradation de la note dans un horizon de 12-24 moins. 

 Depuis 1997, la Tunisie a fait partie du club restreint des pays « grade d’investissement » en Afrique à côté du Botswana et de l’Afrique du Sud. Le Maroc a rejoint ce club seulement en 2010.  Cette bonne note a toujours été expliquée par l’orthodoxie des politiques monétaires et budgétaires du pays qui ont permis de réduire les déséquilibres internes et externes, de renforcer la résilience de l’économie tunisienne face au chocs et de hisser le pays au 55 rang mondial en terme de climat des affaires. Dans son action de notation du 16 Mars 2011 et contrairement aux autres agences de notation, S&P a choisi de donner le bénéfice du doute au pays au vu de son historique de bonne gestion économique. L’agence a décidé de dégrader la note souveraine d’un cran passant de « BBB » à « BBB- » assortie d’une perspective « Stable » contrairement aux autres agences qui ont choisi non seulement de dégrader la note mais aussi de mettre une perspective négative. La perspective stable était alors justifiée par le fait que « les incertitudes politiques et les pressions économiques à court terme étaient mitigées par une flexibilité qui résulte d’un faible déficit budgétaire et endettement externe ». Elle était surtout justifiée, à mon sens, par une conviction que la crise politique serait de courte durée et que le peuple tunisien était relativement homogène laissant croire à un risque très faible voire négligeable de division.
 
Mais depuis cette dernière action de notation en Mars 2011, beaucoup de choses ont changé. 
- La crise politique qu’on pensait d’une courte durée s’est avérée être une crise majeure avec : 1) l’autorisation de plus d’une centaine de partie politiques (pour une population de 11 million d’habitants) crée pour certain par des opportunistes qui ont saisi la circonstance du vide politique pour occuper du terrain ; 2) un gouvernement transitoire qui certes gère le pays et évite qu’on se retrouve dans une situation de chaos mais qui lui-même crie son illégitimité et refuse d’engager le pays sur des projets de moyen terme laissant ça à l’assemblée constituante qui sera élu si les élections prévues pour Octobre se tiennent effectivement à cette date. 
- La crise économique s’est avérée plus sérieuse que ce qui a été initialement prévu avec un taux de croissance anticipé entre 0% et 1%, par rapport à un taux initial anticipé de 2%-3%, et des déficits du compte fiscal et externe qui ont augmenté sensiblement par rapport aux chiffres auxquels nous étions habitués. 
- La crise en Libye qui non-seulement impacte notre économie via les exports directs et indirects, le tourisme, etc. mais aussi notre stabilité socio-politique avec un nombre élevé de ressortissant Libyens en Tunisie avec un statut qui reste à clarifier.
 
Ces développements ont malheureusement entraîné une révision de la perspective de la note Tunisienne de Stable à Négative. Un pays prospère et démocratique avec une société civile forte ne peut pas être bâti en quelques mois. Unissons-nous pour servir ce beau pays qui a pour longtemps fait l’exception dans le continent. Faisons en sorte que les élections du 23 Octobre soient un grand succès et que les projets de constitution, économique, de société qui en découleront soient à la hauteur de l’attente du peuple qui devra exercer son droit et choisir ses représentants ! Faisons la sourde oreille à tous les appels à la division et ayons confiance. Gardons à l’esprit que l’horloge tourne et que le temps qu’on perd est récupéré par nos concurrents. Gardons aussi à l’esprit que la prochaine dégradation de note nous enverra à la « catégorie spéculative » et renchérira notre coût de financement de manière significative réduisant les marges de financement d’autres secteurs plus utile.
 
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15 Commentaires
Les Commentaires
Halim - 05-08-2011 02:04

Il y n'y a pas un secret pour retourner a la normale: Une main de fer ...Ou bien le pays sombrera dans le chaos dans quelques semaines...

Ben Selma Fredj - 06-08-2011 11:04

C'EST MALHEUREUX que beaucoup d'entre nos soi-disant politiciens vont entrainer le pays vers le gouffre. Il est vraiment temps de les identifier et de les exclure car l'intérêt du pays et du peuple Tunisien passe avant cette démagogie, j'ai toujours détesté les politiciens et je suis fier de n'avoir jamais voté pour personne, beaucoup d'autres feront sûrement comme moi car rien n'est encourageant

Ben taher - 08-08-2011 10:41

Une erreur fondamentale des gouvernements de transition a été, par naïveté ou plutôt par complicité et calculs politique primaire, un laxisme portant sur la restitution réelle de "haibet Eddouala". Le fait de n'avoir pas agit de manière rapide et efficace pour montrer à l'ensemble des citoyens qu'il y a un état de droit qui fait justice, ceci a fait petit à petit entrer dans l'esprit de la majorité que rien ne va changer, que les voyous de la république vont non seulement continuer à profiter de leur mal acquis mais que le même système de corruption et malversation va continuer. Face à cela, chacun exprime à sa manière sa contestation - sit in, désengagement professionnel voir même sabotage .... . Bien que la situation est grave et à un stade avancé, le gouvernement peut atténuer la situation dans le bon sens en envoyant un signe fort à la population en dépossédant de l'ensemble de leur mal acquis au moins des gros malfrats connus de tous et qui continuent a narguer et provoquer la population générale par leur luxe ostentatoire d'ailleurs le plus souvent de mauvais gout témoin de l'inculture de ces personnages.

Mohamed Chawki Abid - 08-08-2011 11:20

Dommage que notre Premier Ministre ne sanctionne pas les collaborateurs contre-performants, et n'exhorte pas ses ministres à communiquer mieux et à multiplier les débats politico-socio-économiques en impliquant les partis politiques. Quant aux pseudo-partis (en dehors de Top 10), ne devrait-on pas exiger - préalablement à l'accord de financement de leur campagne électorale - la justification d'une couverture géographique minimale (principaux gouvernorats) ainsi que la présentation d'un Programme socio-économique convaincant. Enfin, je ne peux que partager la récente analyse livrée par Mr Ahmed MESTIRI.

bensassi - 08-08-2011 14:23

Ce n'est pas le seul parametre qui plonge dans le rouge et votre journal électronique peut publier la liste d'autres paramétre qu vont dans le meme sens et ce ne sera pas fini d'ici peu,heureusement que la situation de notre économie à la veille du 14 janvier est des plus solides dans le monde,d'ici quelques mois les réserves se seraient épuisées et tout le monde se sidibouzidra.

Ayoub Abderrahman - 09-08-2011 05:38

Merci pour cet article. Je n'ai pas lu d'aussi sérieux et vrai sur ce site. Je souhaiterais que ceux écrivent signent pour que le remerciement, ou le contraire, leur soient adressé comme cela se doit. L'anonymat est, comme chacun le sait, antidémocratique. J'ai apprécié aussi que l'on dise que le récent passé de la Tunisie n'était pas que de la foutaise. De même j'ai apprécié que l'on rappelle que plusieurs partis qui ont vu le jour ne sont que expressions d'un opportunisme mesquins de la part de ceux dont le narcissisme ne peut que conduire à tout faire pour avoir tout pour soi et rien que du mensonge pour les autres. La presse libre doit les combattre afin que leurs virus ne se propage pas plus. De cet article je déduis aussi que plusieurs ministres de l'actuel gouvernement provisoire (?) qui n'ont pas su redresser la barre (au sein du secteur dont il ont la charge) n'ont pas encore pris l'initiative lucide et honnête de démissionner. S'y complaisent-ils ou bien est-ce un manque de maturité politique et, surtout, d'esprit démocratique ? La conclusion que je tire de cet article est que la dégradation de la notation de la Tunisie (décision plus que probable) résulte de " l'instabilité " dont les auteurs ne sont autres que le gouvernement provisoire, les partis irresponsables et les Instances regroupant beaucoup d'intelligences qui brillent de plus en plus de leur opacité ténébreuse et d’irresponsabilité. Le peuple tunisien n'est pas, en fin de compte, responsable de ce qu'on peut lui faire subir. Il demeure solidaire, assoiffé de justice sociale et de démocratie, pendant que nos illustres intelligences tissent les discours de la discorde. Et autres mauvais discours.

MOHIEDDINE - 09-08-2011 07:36

C'est dommage que le gouvernement ne c'est occupé que des problèmes sociaux et à complètement oublier de s'occuper des problèmes des P.M.E et P.M.I et des agriculteurs qui ont une part de plus de 70% pour le développement de notre économie. Ce gouvernement n'a pris que des décisions politiques et non économiques avec sans aucune stratégie de développement. Toutes ces P.M.E et P.M.I ont été obligées de survivre durant ces dernières 20 années et sont arrivées à une situation financière catastrophique qui ne les encouragent plus à investir car rien n'a été fait ni décidé au niveau des encouragements fiscaux ni au niveau des encouragements aux investissements elles souffrent encore des séquelles de l'ancien régime qui les ont complètement affaibli par le marché parallèle, les contrôles fiscaux, de payer obligatoirement des montants pour des caisses douteuses comme le 26 26 ou 21 21 etc.... Ce gouvernement a trouvé le moyen d'amnistié tous les voleurs emprisonnés et amnistié les voleurs de luxes qui ont des chèques impayés en vers ces P.M.E, P.M.I et agriculteurs. Ce gouvernement lance un appel à toutes ces entreprises à redémmarer l'économie pensant que ces entreprises ont une baguette magique sans leur accorder aucune attention ni décision forte de la part de l'état. Voilà pourquoi notre note à été abaissée et baissera encore si rien ne sera fait d'ici ces quelques temps.

Chiheb Zouabi - 11-08-2011 03:38

Messieurs y'a pas le feu ! C'est pas aussi alarmant que ça, après tout Standard & Poor's n'est qu'une organisation indépendante et puis vu la situation de crise par laquelle passe le pays pendant cette période et l'instabilité de sécurité c'est tout à fait normal cette dégradation, mais c'est pas aussi grave que certains le pensent, dans quelques mois moi je dirai même après les élections on retrouvera bien une bonne position dans la fameuse grille de Standard & Poor's et les affaires tourneront de nouveaux ; ce n'est qu'une question de temps et de sécurité !

Jihedfromphilly - 11-08-2011 16:38

Game Over. Fallait quand meme s'y attendre. La mentality est plus que pourrie, et faudrait surtout pas croire aux miracles. Les jeux sont faits, rien ne va plus. Miskinna Tounes. rendez vous dans 20 ans. Pessimiste? Oh oui, oh oui...

Amor B. SDhia - 11-08-2011 16:58

de stable a negative a "speculative"...Rien de plus bas? Car si on continue comme cela on atteindrait le fond. Deja qu'on travaillait peu normalement, on travaille moins l'ete et encore moins pendant le mois de Ramadhan...De plus on augmente les salaires et on plie devant les pressions corporatistes. On parle des foulards et des burquas...On specule sur le ciment et les produits alimentaires...On batit sans autorisation et en attendant, bien evidemment, on travaille de moins en moins...Alors le fond des notations est notre destination...

Mohamed Chemingui - 13-08-2011 02:12

C'est un tres bon article. Les problemes economiques doivent etre discuter avec beaucoup plus d'attention. On assiste actuellement a des propositions et des programmes des partis politiques qui suggérent augmenter les transferts et les subventions sans se demander comment les financier. La pression fiscale et deja eleve alors reste des substitutions entre les dépenses, mais quelle marge de manoeuvre pour un pays ou les depenses publiques sont dominés par les salaires. La Tunisie, a trevrs son principal atout, une producitivte du travail modéré grace a des salaires controles, risque avec les revendications syndicales et les augmentations de salaires de perdre son avantage comparatif en absence d'une aumgentation de la richesse nationale. Le pays se dirige face au mur et le gouvernement semble ne pas bouger pour mettre fin au desordre.

TRIGUI - 13-08-2011 10:14

Merci pour cet article intéressant et clair et ce pour sauver notre pays qui a donne une leçon modèle 'a tous les pays

Chadi - 13-08-2011 12:10

Toucher le fond...c'est bon ! ça nous permet d'en pendre conscience... et éventuellement de rebondir... Peu de gens s'en soucient hélas !...

adel - 14-08-2011 21:30

Arrêtons de gémir , réagissons et optimisons nos forces

Chiheb Zouabi - 15-08-2011 04:32

En réponse à Mr Amor B.Sdhia, mais monsieur, vous n'avez rien compris ! Mais ce que vous dites monsieur n'a rien à voir avec la notation de Standard & Poor's, n'importe quoi ! Avant d'écrire des commentaires veuillez s'il vous plaît comprendre avant de quoi il s'agit ! Merci. Et pour répondre Jihedfromphilly, monsieur je crois aussi que vous dramatisez les choses, les USA dernièrement avec la crise d'augmentation de plafond de crédit à faillit de peu se faire dégrader par Standard & Poor's ! c'est normal cette dégradation dans notre cas vu que le pays passe par une crise de stabilité mais ça va passer, d'autant plus que BBB- n'est pas vraiment dramatique ! Soyez optimistes messieurs, les choses vont bientôt s'arranger. Merci

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