Tendance - 02.02.2011

La grande soirée parisienne en solidarité avec la Tunisie : Loin des yeux, près du cœur

Paris – correspondance spéciale pour Leaders – L’Elysée Montmartre, sur le boulevard Rochechouart à Paris, était pris d’assaut lundi soir, à l’appel de l’association Action Tunisienne, pour un méga concert de solidarité avec la Tunisie sur le thème de « Loin des yeux, près du cœur. A l’initiative de deux jeunes tunisiens, Mohamed Dhaoui et Mohamed Gastli, une pléiade de stars : Amel Methlouthi, Idir, Souad Massi, Imed Alibi, Kamilya Jubran, Jean-pierre Smadja, Dhafer Youssef et Lotfi Abdelli, célébraient avec ardeur et conviction cette nouvelle Tunisie.  Récit d’Elyès  Slim Ghedira :

  Nombre de nos compatriotes de la ville-lumière ont répondu à l’appel  qu’avaient lancé certaines structures de base de la santé publique en  créant l'association «Action Tunisienne», qui se veut association citoyenne et apolitique. C’est à travers cette association qu’a été organisée la soirée « Loin des Yeux, près du cœur ». Tous les bénéfices de ce concert devant  être versés au croissant rouge tunisien.

Un plateau de choix, artistes de tous bords et à l’engagement certain, ont assuré un spectacle de première qualité, comme on en a rarement vu dans les charity events.


Une forte affluence
Un grand cœur frappé de l’étoile et croissant rouges sur fond de Lune blanche.
L’affiche était  placardée partout depuis quelques jours dans les rues de Paris. Ils ne pouvaient être que nombreux, cette nuit, à venir témoigner de leur lien fusionnel avec leur  pays natal …

Muni de mon badge de presse , j'entre dans la salle.  Effectivement, pas un fauteuil vide. Je demande à rencontrer Mohamed Dhaoui et Mohamed Gastli, les fondateurs de « Action Tunisie » et organisateurs du concert : deux jeunes expatriés, la trentaine à peine entamée, l'amour du pays chevillé au corps.

Une association citoyenne

« Action tunisienne, nous dit Mohamed Dhaoui, est une association citoyenne et absolument apolitique, je le répète bien apolitique !!! Action tunisienne mouvement crée il y a moins de deux semaines, a pour but de promouvoir le débat social chez les tunisiens, qu’ils soient en Tunisie ou en dehors. Toutes les idées sont les bienvenues,  le site web est disponible pour tout le monde. »

« L’idée d’organiser un tel concert, ajoute-t-il, est venue en voyant les images et les vidéos des meurtres, pillages, et destructions urbaines des derniers jours. On ne pouvait pas rester de marbre, notre pays appelait à l’aide. Le croissant rouge est déjà sur place, il est déjà opérationnel bien avant le 14 Janvier, notamment auprès des familles des disparus et des blessés. Dans l’urgence c’est la structure la plus fiable à aider, humainement et matériellement »

Pour Mohamed Gastli, « évidemment, tous les bénéfices de ce concert, à travers les droits d’entrée, seront reversés au croissant rouge. Tous les artistes sont venus spontanément et bénévolement, sans cachet. Les propriétaires de la salle nous ont aussi garantis une aide technique et un prix circonstanciel pour la location. Nous remercions toutes les parties qui ont fait que, en moins d’une seule semaine uniquement, cet événement soit possible ».

Le concert démarre à l’heure, avec des artistes se relayant chacun et se produisant pendant 15 à 20 minutes, le temps de deux ou trois morceaux. Le public était accroché à l’atmosphère patriotique et émouvante qui plane.

La voix, la musique et l'humour en soutien

Notre première rencontre dans les coulisses fut avec Idir, âme de la pop Kabyle, pendant que l’humoriste Lotfi Abdelli, invité surprise non prévu au programme, se produisait sur scène.

Idir : « Si il y avait un pays arabe, à travers lequel pouvait émerger un vent de liberté et de démocratie, ce serait forcément la Tunisie. A travers l’éducation et aussi la place faite à la femme dans la société tunisienne, ça ne pouvait être que celui pays là. Les autres suivront à leur vitesse, mais le monde se rappellera que la vague est venue de la Tunisie. Il faut accorder une grande place aux victimes tombées pour ce combat de la dignité, un jour de commémoration doit être réservé à leur mémoire désormais ».

Un algérien en cachait une autre, Souad Massi accrochée à sa guitare folk avant de monter sur scène a tenu bon à nous donner  ses impressions : «  Je ne m’attendais pas à ça, sincèrement, et avec une aussi grande rapidité en plus. Vraiment on a été épatés par le courage des tunisiens, franchement bravo !!! Les Tunisiens sont désormais libres et ils l’ont mérité. C’est l’exemple à suivre désormais ».

Mon regard croisait alors celui d’une amie, Amel Mathlouthi, qui laissait la scène et un public aux larmes transporté par sa voix toujours sublime. Amel était accompagnée de deux bon amis aussi,  et musiciens de génie, Zied Zouari au violon et Imed Aalibi aux percussions. Je me suis rappelé alors que Imed, originaire des environs proches Sidi Bouzid, bien qu’étant résident en France,  était justement à Sidi Bouzid lors des événements sanglants.

Imed Alibi : « j’étais en Tunisie vers la mi-décembre, on tournait avec Amel Mathlouthi. Juste après notre concert de Sfax, je suis rentré voir la famille et c’est là que tout a commencé. Il régnait un sentiment d’injustice très fort à Sidi Bouzid vis-à-vis de la tragédie Bouazizi. C’était différent des revendications de Gafsa en 2008. Là, il s’agissait vraiment d’en finir avec ceux qui nous gouvernent, et non pas d’une revendication salariale ou syndicale éphémère. J’espère que la nouvelle gouvernance saura répartir équitablement les richesses du pays. Notre région est vraiment délaissée, il n’y a pas de tourisme, ni industrie. Rien ne bouge, il n’y  a pas de dynamisme économique, pourtant la jeunesse elle, n’en manque pas !!! Il y a notamment une richesse artistique locale qui demande a être appuyée par des structures culturelles de proximité qui nous manquent tant !!! J’espère que ceci va changer ».

Je laisse mon ami Imed, qui était vraiement ému la larme à l’œil pour reprendre mon souffle.

C’est alors que je fus accueilli par le large sourire de Dhafer Youssef, le plus génial des artistes tunisiens toute catégorie, l’extra-terreste comme l’appellent ces fans !!! Dhafer ne manqua pas de nous signaler son grand soulagement quand à la chute de la dictature, régime policier  implacable, qu’il a dû subir à quelques occasions. Dhafer nous dit qu’il faut tourner la page, et qu’il n’a jamais eu envie de parler de ce passé.

La dame posant avec Dhafer sur la photo, n’est autre que Kamilya Jubran, chanteuse et instrumentiste Oud palestinienne, née en Galilée.  Kamilya : « la Tunisie a de la chance d’avoir un peuple aussi courageux et instruit. J’espère pouvoir voir ce vent de liberté parmi les miens. J’espère voir Jérusalem libre de mon vivant. Gloire aux Tunisiens, qui ont montré la voie !!!»

Je me joins après ces rencontres enrichissantes, au public présent et vibrant avec le luthiste tunisien Jean-pierre Smadja et son duo éléectro-undergroud « Duoud ». Je découvre une audience non exclusivement tunisienne, audience qui entre les allées et venues des Artistes sur scène, comme pour remplir un vide, étonnait volontiers Houmet el Hima. Chant apprécié par le musicien belge David Lynx et le guinéen Djeli Moussa Diawara présents parmi la brochette d’artistes. Chant qu’ont également appris par cœur à l’occasion, certains parisiens et autres européens tunisophiles, menés par les mêmes idéaux de cette jeunesse qui a su mené le combat de la dignité.

Elyes Slim Ghedira


Photos : Sylvain Gelineau,  Aymen Saibi, Elyes Slim Ghedira

 

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1 Commentaire
Les Commentaires
R - 04-02-2011 12:03

Hey les Parisiens, vous allez faire quoi avec la collecte d'argent? 25 Euros la place par personne ca fait 50 Dinars Tunisien...ce que Mohamed Bouazizi se gagnait en 1 semaine!!! C'est beau de faire un concert mais pour quelle solidarité? les poches de qui?

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