Raoudha Bayoudh: Première femme directrice de la Police judiciaire
Elle coiffe désormais la toute-puissante direction de la Police judiciaire (PJ), c’est-à-dire le cœur battant de la prévention et de la lutte contre la criminalité, installé à El Gorjani… Raoudha Bayoudh, juriste de formation alignant plus de 20 ans de carrière, commissaire de police générale 1ère classe - soit le grade le plus élevé - est la première femme tunisienne à occuper ce poste. Plus encore, la première femme dans le monde arabe hissée à ces fonctions. Et comme le directeur de la PJ est également le chef du Bureau central national qui assure la liaison avec l’Interpol (relevant de l’Organisation internationale de la police judiciaire, regroupant 197 pays membres), Mme Bayoudh devient ainsi la première femme à exercer cette charge, tout comme celle de la section de contact et de coopération entre les organismes arabes de police…
1998 : Maîtrise en droit, faculté de Droit et des Sciences politiques de Sousse
1999 : Admission au concours de recrutement des commissaires de police
2000 : Affectation à la Police judiciaire en qualité de commissaire de police, chef de poste, au service de la Protection de l’enfance, au sein de la sous-direction de la Prévention sociale
2005 : Chef de brigade au Bureau central national de liaison avec l’Interpol
2007 : Chef du service social
2015 : Décoration des insignes de chevalier dans l’Ordre du Mérite national, section Enfance
2016 : Sous-directrice de la Prévention sociale
2021 : Directrice de la Police judiciaire
La charge est aussi délicate que difficile à assumer. La direction de la Police judiciaire couvre six sous-directions, revêtant chacune une importance spécifique. Il s’agit de la lutte contre les stupéfiants, des affaires criminelles, des enquêtes économiques et financières, de la protection sociale, des études et du suivi comprenant notamment le bureau de Tunis de l’Interpol et des enquêtes dans les crimes financiers complexes. Drogue, banditisme, criminalité en tous genres, délinquance infantile et juvénile, agressions sexuelles, violence contre la femme et autres : la PJ est sur toutes les lignes des plus grands dossiers, son périmètre de compétence s’étendant à l’ensemble du territoire. Qu’il s’agisse de flagrant délit ou d’un mandat rogatoire ou encore d’instructions du parquet, elle se déploie au service de la justice.
La renommée de la PJ est faite. Le nombre de grandes énigmes élucidées, d’affaires complexes traitées et d’enquêtes menées avec succès ont contribué à la réputation de ses brigades. La modestie des moyens est compensée par la compétence et le professionnalisme de ses équipes. La désignation de Raoudha Bayoudh, issue des mêmes rangs, ne manquera pas de donner une forte impulsion à cette institution de la Police nationale.
Une passion, en profession
Dans son bureau à la caserne d’El Gorjani, la nouvelle directrice se sent parfaitement à l’aise. C’est dans cette enceinte qu’elle a jusque-là effectué toute sa carrière, depuis maintenant 21 ans, dans une ascension continue au mérite et à l’excellence.
Encore jeune lycéenne dans sa ville natale de Ksour Essaf (Mahdia), Raoudha Bayoudh était déjà attirée par le droit. Elle suivra son cœur, quitte à changer de la section Sciences à la section Lettres… Maîtrise en droit obtenue à la faculté de Droit et des Sciences politiques de Sousse, elle hésitait encore entre magistrature, barreau et police, postulant aux trois concours d’entrée. C’est finalement la Police nationale qui a été la première à lui notifier son admission… Raoudha Bayoudh rejoindra sans tarder l’École nationale de formation des cadres de la Police à Salammbô pour commencer le cursus de formation commune de base, avant d’entamer les études pendant un an, puis d’effectuer, durant une année, des stages dans les postes et commissariats de police du Grand Tunis et à l’intérieur du pays.
A l’épreuve de la triste réalité sociale
Commissaire de police chef de poste, elle est affectée, en 2000, à la Police judiciaire, au sein du service de la Protection de l’enfance relevant de la sous-direction de la Prévention sociale. Cinq ans durant, Mme Bayoudh s’occupera des mères célibataires qui abandonnent leurs nouveau-nés, des enfants traînant sur la voie publique, des gamins et gamines en fugue, abusés, violentés, de l’enfance en détresse. Une triste réalité sociale qui la marquera et l’incitera à réfléchir aux racines du mal et à la prévention.
L’occasion lui est offerte en 2005 de rejoindre, toujours au sein de la PJ, le Bureau central national de liaison avec l’Interpol. En un an et demi, elle se familiarisera avec le traitement des dossiers y afférents, ce qui lui sera utile à présent dans ses nouvelles fonctions.
De retour en 2007 à la sous-direction de la Protection sociale, Raoudha Bayoudh est nommée chef de service. Deuxième femme à occuper ces fonctions, après Najet Jaouadi, elle s’y investira pendant 10 ans, avant de succéder une fois encore à Mme Jaouadi, en tant que sous-directrice. C’est un travail à la fois judiciaire, sécuritaire et social où des cas sociaux pénibles sont à gérer. Du harcèlement à travers les réseaux sociaux et autres moyens de communication, à la traite des êtres humains, en passant par diverses formes de délinquance, de violence et d’agressions contre la femme et l’enfant : le spectre est très large, pris en charge par sept services.
L’une des grandes fiertés de cette commissaire de police générale 1ère classe et mère de trois enfants, c’est sa décoration en 2015 par le Président de la République des insignes de chevalier dans l’Ordre du Mérite national, section Enfance…
L’opérationnel et le stratégique
Sous-directrice de la Protection sociale, il appartient à Mme Bayoudh d’animer toutes ces équipes, de superviser leur travail, de faciliter leur tâche et surtout de les encourager à s’y accomplir. L’ancienneté et l’expérience acquises, mais aussi la compétence, l’autoriseront à assurer plus d’une fois l’intérim du directeur de la Police judiciaire quand il partait en mission à l’étranger ou en congé. Un intérim qui la préparera à bien assumer ses nouvelles fonctions.
Opérationnelle et stratégique à la fois, Raoudha Bayoudh agit parallèlement sur les deux niveaux. De toute son énergie, elle est déterminée à apporter une valeur ajoutée tangible. Son ambition est de renforcer les capacités de la PJ, de faire avancer les chantiers de la numérisation et de l’informatique, de pousser la spécialisation, d’approfondir la formation et d’intensifier la coopération internationale. Son atout, c’est l’excellent esprit d’équipe qui règne à El Gorjani et la volonté de tous de tenir une haute réputation d’excellence au service du pays. Une chance se présente, l’emménagement, d’ici au début de l’année prochaine, du nouveau siège moderne de la PJ, finalement construit dans la même enceinte
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