Rym Ghachem Attia : Il faut sauver la médecine hospitalière
Matricule fiscal, identifiant unique, carte d’identité, carte de soins etc … tout est là pour nous faciliter la vie face aux mouvances et contradictions de l’administration de jadis. Pourtant, cette administration-là était plus proche du patient et l’aidait à prendre son mal en patience ! Médecins et corps paramédical semblaient être plus proches et à l’écoute du malade.
De nos jours, les analyses, les radios, les scanners etc sont des mines d’informations utiles pour le médecin qui ne discute pas avec son patient considéré le plus souvent comme un simple objet ! Ce qui est encore plus affligeant c’est qu’on fait subir une sorte d’ingratitude aux personnes âgées qui ont peiné pour l’infrastructure sanitaire et l’éducation /formation du personnel de santé ! Quelle affligeante ingratitude !!
Livrée, à la fin de sa vie, à des machines sophistiquées et en ne percevant que les bips terribles et vrombissements des appareils « trop éloquents » sans mots ni paroles, une grande personnalité confiante dans les prouesses de la technicité semble être perdue dans ce qu’on appelle « parfaite réanimation » et nécessité de « remonter le potassium » pour allier « la détresse respiratoire »… « Intubation … antibiothérapie adaptée ».
Mais tout cela sans aucune parole, aucune discussion avec la famille, le staff médical ne regarde ni les parents ni les enfants ! Silence éloquent du à l’aveuglement de leurs technicités ! Est-ce le la méfiance ou plutôt de l’indifférence ! Dans les deux cas on sème le trouble chez le patient et ses proches !
La médecine serait elle devenue trop robotisée, notre médecine tunisienne se caractérisait par son humanité, son empathie ! Ses valeurs ont-telles disparues ? A-t-on fait une rétrospective de ce que nous inculquons à nos médecins comme aspects psycho-sociaux de notre noble métier ? La santé mentale est pourtant là tant pour les soignants que pour les patients !
En psychiatrie, par contre, même si il y a pénuries de médicaments on essaie de combler ces difficultés en convoquant la famille, en appelant l’employeur, en accompagnant le malade chez lui tout en s’assurant qu’il pourra avoir ses médicaments.
Certains malades chroniques rejetés par leur famille vivent même à l’hôpital où tout le staff paramédical s’efforce de devenir un partenaire. Une résidente en première année amène tous les jours de la nourriture pour son malade et la ration de cigarette nécessaire. Elle fait fi des normes et s évertue a lui rendre la vie moins triste.
C’est cette Tunisie, c’est le médecin tunisien que j’ai admiré un jour et qui a fait que j’ai voulu appartenir à cette famille, noble, médical. J’ai appris que la médecine cherche non seulement à soigner, et améliorer la santé mais aussi à s’intéresser à la personne et à renforcer sa capacité à s’attacher à la vie et à son sens ! Cette « utopie » fait de la médecine une tâche complexe et vulnérable et se situant au-delà des diverses déviations. Lorsqu’on se donne comme objectif d’aider le patient à surmonter sa souffrance, le respect de sa dignité représente un défi continuel..
Nous devons sauver notre médecine. La médecine hospitalière doit être aidée et doit être sauvée ; il y va de la santé tunisienne. Quand une pharmacienne chef de service vit depuis plus de 6 mois sous la menace d’une mort alors qu’elle ne fait que son travail ! Elle s’efforce de le faire comme ses paires alors que l’administration aliénée à son inertie habituelle lui montre que rien ne bouge !!!
Je dis non non et non à cette inertie. Une révolution médicale doit se produire. On remarque des médecins en Burn- out des infirmiers dépassés par une charge de travail ! Des mises en congé de longue durée avec des tourbillons et des cercles vicieux à n’en plus fini ! La santé publique est en danger et personne ne pourra la sauver ! Il faudra la considérer comme une priorité et préoccupation nationales et qu’elle concerne toutes les parties. Toutes les mesures doivent être entreprises en alliant le secteur privé, le secteur public, la société civile, les syndicats, les municipalités …le personnel soignant les soignés …
Nous avons des compétences mais vont-elles rester ?, Le nouveau système médical est magnifique ! Mais nous devons nous atteler à veiller à sa pratique dans les règles de l’art.
Messieurs, Mesdames, il est temps de se secouer car bientôt il sera trop tard et il n y aura peut être plus aucun moyen de sauver un de nos acquis les plus en vie et les plus importants. La vie est courte et le temps, n’attend pas.
Rym Ghachem Attia
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Bravo Mme Rym Ghachem pour avoir crier à l'instauration de l'humanisme dans le système de la santé Tunisienne. Un créneau hélas ignoré. Un appel digne d'un vrai "Leader" Nous devons tous lutter pour une médecine humaniste plus transparente et s'éloigner des ténèbres qui sévissent dans le domaine médicale. Respecter son patient c'est respecter soi même.
excellent article qui fait ressortir la nécessité d'une bonne communication entre soignants et soignés
Bravo Rim pour cette analyse pertinente qui me rappelle les appels tenus dans les années 70 et 80 par un regretté maître et ami dont elle porte l'illustre nom : Son père le Pr Abdellaziz Ghachem pionnier de la médecine légale et de la médecine du travail en Tunisie.