News - 08.06.2016

Baguettes magiques et création d’emplois

 Baguettes magiques et création d’emplois

Voilà  cinq ans que les gouvernements  successifs  répètent que  le niveau « actuel » du chômage est le résultat  d’accumulations, d’insuffisances ou d’erreurs commises  dans le passé,  et surtout dues au modèle de développement adopté. Tous affirment   également qu’ils ne disposent pas de baguettes magiques pour résoudre  tous les problèmes qui entravent la création d’emplois  et le développement en général. Ils en appellent ainsi à la  raison et à la patience  des citoyens. Mais les solutions proposées ou mises en œuvre  n’ont jusque là  induit aucun  effet notable et durable  sur la capacité de l’économie à créer des emplois. Nous sommes toujours dans la sphère de la fonction publique et des emplois publics ou assistés.     

S’il est vrai qu’il n’y a pas à priori des recettes magiques pour venir à bout du chômage, il y a lieu cependant d’apporter davantage de pragmatisme dans son traitement. 

Nous tenterons dans les développements qui suivent  de proposer   quelques mesures  susceptibles  d’améliorer le fonctionnement  des entreprises et leur rentabilité  tout en augmentant leurs capacités à recruter. C’est en tout cas la seule voie qui nous paraît intéressante. En somme, la baguette magique.  La croissance par la productivité globale qui couvre à la fois la productivité du capital par l’amelioration de l’utilisation des moyens de production, et la productivité du travail par l’amélioration   de l’encadrement.  Il est à espérer des points de croissance par la productivité car notre économie comporte à ce niveau des gisements  énormes.

L’une des mesures à la quelle  je pense   découle entre autres de mes observations lors de l’exercice de mes différentes fonctions  parmi lesquelles la direction de la COTUNACE. J’observais alors que les exportateurs notamment les PME que j’ai appris à connaître, rencontraient  parfois des problèmes par suite de négligences  et de non observation des clauses des contrats qu’ils ont  conclu avec leurs clients  ou leurs partenaires. A l’examen je me rendais compte qu’ils n’avaient  pas toujours de service ni  même de responsable de l’exportation,  ni de contrôleur  de  qualité ni de gestionnaires ni de juristes…. Le chef d’entreprise fait tout lui même ; il achète, il importe, il rend visite aux fournisseurs et clients tunisiens et étrangers, il surveille  la production, il assure les relations avec l’administration … En un mot il ne délègue rien  de ses pouvoirs de gestion. Quand il le fait c’est pour  son fils, sa fille  ou un proche  mais ils doivent toujours se référer à lui. Il est partout, et sur tous les fronts. 

Lors d’indisponibilité  occasionnelle  du Patron, tout s’arrête  ou presque.

En fait  les non conformités aux clauses contractuelles et aux procédures étaient fréquentes, et c’etait souvent l’insuffisance de l’encadrement qui était à l’origine ….
Recruter un cadres qualifié  ou à qualifier ,chargé  de l’élaboration des contrats et du suivi des exportations ,et  un autre pour être chargé de la qualité en cas de besoin ,ne pouvait que donner à l’entreprise plus  de chance de  rentabiliser  son exploitation et de se développer.
Parmi les demandeurs d’emplois on sélectionnerait ceux qui pourraient recevoir une formation  de « Responsable Qualite » et tout le monde  sera gagnant.  
Il ne s’agit point d’exonérer ces nouveaux cadres de la cotisation à la CNSS. Mais plutôt de rendre leur recrutement utile et bénéfique car l’entreprise y gagne aussi. Tous les exportateurs doivent normalement disposer d’un responsable Qualité,  d’un responsable Commercial, d’un juriste ou gestionnaire polyvalent.
Nous  pouvons penser également à  inciter les entreprises à examiner de près leurs  frais financiers  souvent importants  comparés aux résultats. En ma qualité de  dirigeant de différentes entreprises, je m’étais livré à cet exercice. Pour chacun des comptes bancaires auprès de différentes  banques, j’ai affecte un jeune SIVP dont la mission était de contrôler   « les dates de valeur » les commissions bancaires, Etc.…  Une formation rapide en a fait  les gardiens des comptes bancaires. 
Le résultat fut impressionnant. Un virement de l’étranger pouvait attendre sans raison  une semaine pour être logé dans le compte de la société ; des erreurs, même petites mais nombreuses étaient relevées et l’on devine le résultat : les petits taux font les grands totaux.  Je n’étais pas peu fier de ma trouvaille. Ces contrôleurs de compte  avaient réussi à  faire réaliser à l’entreprise des économies supérieures à leurs salaires….C’était leur  principale tâche.
Des questions se posent : Toutes les banques opérant en Tunisie sont bénéficiaires, toutes et largement.  Un grand nombre d’entreprises sont déficitaires, et l’économie est en crise. Un paradoxe. Je n’ai pas d’explication mais c’est une question que nous devons nous poser. 
Pour le moment nous nous contenterons de chercher et de trouver des pistes  pour des mesures  similaires qui pourraient ensemble constituer une baguette, au final pleine de magie.
Je voudrais signaler également  la gestion  des Ressources Humaines. Pour les entreprises familiales, l’objectif est souvent de passer la main à  l’un des enfants. 
L’on oublie  souvent  que l’on a fidélisé un collaborateur  qui attend lui, de prendre un peu du pouvoir du chef d’entreprise. Mais lorsque le fils ou la fille du Patron arrivent, c’est un choc et c’est parfois la rupture: Le cadre fidèle est déçu et quitte « son » entreprise pour en créer une autre concurrente. S’il ne quitte pas, il sera en tout cas  déçu et démotivé.
Ce phénomène est  fréquent. Ces deux entreprises  seront sous encadrées. Elles vont se partager la clientèle  et les fournisseurs et les moyens humains. Aucune ne se développera  convenablement ….Le transfert du pouvoir de décision  entre les membres de la famille doit être étudié avec soin et opéré dans le respect des intérêts en présence.  Le fils ou a fille destinés  à prendre la relève du fondateur doivent  penser à l’avenir de l ‘entreprise et non seulement au leur ; car du premier dépend le second.
Le secteur agricole pour sa part  est riche en baguettes magiques créatrices d’emplois. Des  terres agricoles couvrant des superficies énormes et non exploitées sont nombreuses et étendues. 
Les diplômés des  écoles d’agronomie et les techniciens d’agriculture pourraient se voir attribuer, à titre de location ou autres, des lots de terrains  et être assistés aux niveaux du financement, de l’investissement  et de l’exploitation. Ils ne chercheront plus ni à  migrer vers les centres urbains, ni a réclamer un emploi dans la fonction publique. La Banque Nationale Agricole qui ne reserve que moins de 15 % de ses ressources pour financer l’Agriculture  est appelée à fournir un effort considérable pour soutenir l’agriculture qui reste un secteur stratégique principal.  Elle mériterait alors son nom.  
D’autres petites baguettes magiques, seraient à identifier pour alléger progressivement  le poids du chômage et notamment celui de la non employabilité des mal-formés.
Il ne serait pas sans intérêt que les recrutements d’étudiants dans les filières  de l’Enseignement Supérieur  dont les spécialités ou les emplois ne sont pas disponibles soient limités  et les capacités de ces filières elles mêmes reconverties dans les filières de l’enseignement professionnel. Cela réduirait les inadéquations et donc les contestations.
Il serait en outre utile que l’on revienne à la   loi qui exonérait  de l’impôt, les bénéfices  réinvestis  soit dans l’entreprise elle-même, soit dans   une nouvelle entreprise, sur agrément bien sur en vue d’en augmenter la capacité,  ou en améliorer la rentabilité. 
La liste des possibilités  de créer des emplois, pourrait être plus  longue. Chaque possibilité serait assimilée à une petite baguette et l’ensemble aurait un effet magique.    
Même dans le secteur des banques, l’un des rares secteurs restés à l’abri des turbulences, au moins par les résultats financiers affichés,  soutenir davantage l’économie et faciliter  d’une manière plus efficace notamment aux PME l’accès  au crédit, peut s’avérer opportun et efficace pour créer plus d’emplois.
Le résultat? Créer  à court terme une centaine de milliers d’emplois pour les jeunes diplômés, et à moyen terme  beaucoup plus .C’est dans cette recherche continue d’opportunités, que réside la baguette magique que nous évoquions plus haut.
Concernant enfin le partenariat avancé avec l’Europe  supposé résoudre les problèmes du chômage et  relancer l’économie, il y a lieu au préalable de résoudre le problème du visa. Si l’Europe veut bien nous aider comme elle le dit et le redit, elle devrait  pouvoir accepter d’ouvrir ses frontières pour accueillir  quelques 300 000  jeunes Tunisiens et les déployer dans les secteurs de l’agriculture et des services objet des négociations actuelles. Ces jeunes pourraient acquérir certaines compétences et de l’expérience et rentrer après une certaine période dans leur pays et contribuer à son développement.
Cela correspond à seulement l’équivalent  de 0,1 % de la population Européenne. Ce qui est véritablement insignifiant. Ceci est d’autant plus nécessaire que l’Europe ne cesse de recruter les cadres Tunisiens d’une manière sélective, dont la formation est assurée sur le budget  de l’Etat Tunisien. Ce serait  la une baguette vraiment magique à côté de toutes les autres. Et la discussion pourrait commencer sur l’avenir des relations Euro-Tunisiennes. Aux négociateurs Tunisiens de jouer …
Moncef Zouari
 
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1 Commentaire
Les Commentaires
Rachid MARDASSI - 09-06-2016 11:34

Vous parlez de capital en Tunisie?A un stade primaire et primitif peut-être,ou dans une autre vie! 95% des détenteurs d'argent(capital) en Tunisie sont des ignares et ont une conception féodale de l'investissement,ne correspondant même pas a la formation du capital en Occident au Moyen Age et je n’exagère pas! (Comparez avec les Cites Etats de Florence,Gênes ou Amsterdam au 15e et 16e siècles).A qui la faute?Au dirigisme étatique post indépendance,manque de vision prospective et gestion calamiteuse de l’économie. Avant de penser création d'emplois,il faut d'abord trancher en matière de modèle de développement économique,adapté a la spécificité et capabilites des tunisiens,élaborer une vision prospective en rapport avec avec les besoins du marche mondial et les orientations de l’économie mondiale pour les moyen et long termes et décliner cette vision sur les secteurs concernés et en priorité l'enseignement et la formation,puis le système financier etc. En attendant,l'Etat,seul responsable de cette débâcle,peut trouver des solutions de transition pour une résorption massive du chômage et inégalités structurelles,en lançant de gros travaux d'infrastructures et d’équipements et en décrétant un plan Marshall pour l'agriculture selon les modèles Danois et Hollandais.Ces deux pays produisent quatre fois leur consommation en produits agricoles et exportent 3/4 de leur production! .

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