Le trio de choc de Studio Shems Fm
A trois, ils tiennent en haleine chaque jour des centaines de milliers d’auditeurs de Shems FM. Du lundi au vendredi, dès 11h57 et pendant plus de deux heures, traitement à chaud de l’actualité, revue de presse commentée, grandes interviews et face-à-face. Les acteurs du jour, de la politique, comme de l’économie et du social passent sous leur moulinette, avec un intermède de cinq minutes dédié au sport « Malla Sport ! », mais dans la même trempe décalée et décapante. Hamza Belloumi et Khouloud Gharbi, 29 ans chacun, tous deux juristes, et Aïda Arab, 42 ans, diplômée de l’IPSI et championne d’Afrique de basketball, mènent le bal dans Studio Shems, à un rythme accéléré. Grâce au soutien de la productrice Rania Boutouria au large carnet d’adresses et capable de convaincre les plus irréductibles à venir sur antenne. Les fauves, aux griffes en apparence lisses, sont lâchés à l’assaut des vieux routiers de la politique qui s’y prêtent, non sans réel plaisir.
Chacun a son propre parcours initial. Tous se retrouvent autour d’un même concept qu’ils n’hésitent pas à remettre chaque jour en question. L’essentiel est d’offrir un talk-show encore plus riche, encore plus attractif. Passer d’une radio de divertissement à une radio de contenu, de mission, en s’imposant la rigueur du professionnalisme et l’éthique de l’indépendance vis-à-vis de tous: le challenge n’est pas facile. Une expérience exceptionnelle, depuis la révolution, et encore plus sur Shems FM.
«Pour aboutir à cette nouvelle version de Studio Shems, confie Khouloud, il fallait remettre à plat les anciennes formules fondatrices. Nous étions partis d’une grande interview, entrecoupée de musique, mais nous nous sommes aperçus qu’il fallait introduire d’autres genres journalistiques, porter un regard différent sur l’actualité et ré-architecturer les séquences, en relançant sans cesse l’attention des auditeurs. Déjà, la formule du duo avec Hamza fonctionne bien dans une complicité totale et une complémentarité des rôles. Mais ce n’était pas suffisant. A force d’y réfléchir avec l’ensemble de la rédaction, on a fini par mettre au point une nouvelle approche». «L’émission commence à 11h57 et non à midi pile, explique Hamza Balloumi. Ces trois précieuses minutes nous permettent d’annoncer le sommaire du grand journal radiophonique qu’on propose jusqu’à 14h. L’ouverture se fera par le journal qui s’étale sur 10 minutes, puis on attaque la première grande séquence, consacrée à l’évènement, pour traiter du point chaud du jour dans la confrontation des points de vue en toute impartialité. On fera une première pause pour une revue de presse commentée, sous le titre de «Jaridet Kalou». Chaque jour, c’est un confrère qui est ainsi invité pour réagir à ce que rapportent les médias. On repart pour écouter la bande de Studio Shems, montage des propos les plus significatifs exprimés sur Shems FM dans les différents journaux parlés et les autres émissions que nous concocte Aïda Arab. Mehdi Houas vient au micro nous raconter ce qui se passe sur le web, avec les grands buzz, les coups fourrés, le vrai et l’intox. La grande édition du journal de 13h approche, avant de céder l’antenne, on revient sur les grands faits du jour pour les commenter, puis on se ménage une courte pause, le temps de reprendre le souffle et de se préparer à la deuxième tranche qui nous conduira jusqu’à 14h».
Tout est dans la bonne préparation et la réactivité
Hamza est méticuleux. Stylo à encre en main, il actualise sans cesse le conducteur chronométré de l’émission et passe le fluo de différentes couleurs sur les points importants. Les questions qui seront posées sont soigneusement écrites, les articulations sont prêtes. Dès 9h30 du matin, la première conférence de rédaction permet de caler les différentes séquences. Rania Boutouria, imbattable sur l’actualité, fait office de chef d’information, signalant les évènements prévus, les déclarations importantes déjà faites, les informations pertinentes puisées ici et là. La veille déjà, on avait anticipé, au cours de la deuxième conférence de rédaction tenue l’après-midi, en proposant des thèmes, des invités et des idées journalistiques. Il ne reste plus qu’à se caler encore plus par rapport à l’actualité. Chacun intervient de son côté et on finit par fixer le conducteur et s’assurer de la présence des invités.
«Pour cette deuxième tranche, on prend tout le temps de faire parler la ou les vedettes du jour, nous dit Khouloud. Il peut s’agir d’une grande interview pour soumettre une personnalité de premier plan sous le feu croisé avec Hamza, aux questions les plus pertinentes. Ou de mettre face à face deux protagonistes, en attisant leurs confrontations. Un peu avant la fin, on leur accordera une courte pause, le temps qu’Aïda Arab nous fasse en cinq minutes vivre l’actualité sportive, à coups d’interviews express, de commentaires et d’infos exclusives. Puis, on reprend de plus belle, souvent pour un coup de grâce qu’adorent nos auditeurs ».
Une équipe soudée
Dans ce registre, les moments chauds ne manquent pas. Le passage des Rached Ghannouchi, Béji Caïd Essebsi, Hamma Hammami et autres ténors resteront mémorables pour l’équipe. « Nous prenons grand soin de nos invités dès leur arrivée à la radio, révèle Khouloud, pour les mettre à l’aise avant même de passer au studio, discuter avec eux de divers sujets autres que ceux de l’interview. C’est un peu ma mission, en me montrant la plus cool possible. Hamza, jusque-là, n’apparaît pas. Puis, une fois sur antenne, c’est moi qui monte au créneau et c’est lui qui me reprend, en alternant successivement les positions, pour relancer encore plus l’interview et la rendre plus percutante. On ne lâche prise que lorsque nous obtenons de bonnes réponses. Nos invités se murent parfois dans leurs discours, tournent autour du pot, sans livrer l’essentiel, mais c’est à nous de les faire parler et c’est ce qui fait le charme, partagé, de l’exercice ». Une fois le jingle final lancé, la mission de l’équipe n’est pas terminée. Il va falloir débriefer, faire le bilan pour vérifier si l’objectif est atteint et surtout essayer de faire encore mieux le lendemain. «Nous sommes constamment à la recherche du perfectionnement, confie Khouloud, et on ne cesse de se poser des questions, mêmes les plus absurdes, sur notre métier de journaliste, la mission des médias dans cette délicate phase de transition, notre conception de la nouvelle citoyenneté et autres. Nous procédons en vrais chercheurs en quête de réponses, de modes d’emploi, de repositionnement continu.»
L’équipe est très soudée. « C’est l’effet Shems, affirme Aïda Arab. On est tous impliqués dans le projet. La direction nous y incite à fond : Fathi Bhoury et Imad Ketata s’investissent à fond, pour soutenir l’ensemble des équipes, à tous les niveaux. Cette radio, c’est nous tous qui la fabriquons et c’est elle, en retour, qui nous façonne. Un effet magique qui est fort gratifiant à ressentir auprès de nos auditeurs ». La concurrence est cependant rude et il va falloir faire mieux. Le défi se renouvelle chaque jour. C’est ça le charme de la radio.