Tunisie – Italie – Afrique : D’égal à égal, la main dans la main, et une locomotive conduite en commun, dans le bon sens
La Tunisie a été attentive au Plan Mattei en faveur des pays africains, annoncé par la présidente du conseil des ministres italien, Giorgia Meloni, lors du récent sommet Italie / Afrique. Tenu à Rome, le lundi 29 janvier 2024, ce sommet a regroupé 25 dirigeants du continent, entre chefs d’Etat, de gouvernement et ministres, ainsi que les représentants au plus haut niveau de l’Union africaine et de l’Union européenne. Prenant part aux travaux, le président Kais Saied a salué « l’esprit nouveau qui préside à ce sommet, dans la diversité des approches », plaidant en faveur d’une société humaine nouvelle, fondée sur la justice et l’égalité, sans discrimination, ni ordre privilégié. Bannissant de vieux concepts désuets, il a appelé à « des relations d’égal à égal, la main dans la main », et au déploiement d’une « locomotive conduite en commun », circulant dans les deux sens, vers la bonne trajectoire.
Le Plan Mattei, prévu pour une durée de 4 ans, et devant bénéficier à neuf pays africains, est doté d’une mise de fonds italienne initiale de 5.5 milliards d’euros, dont 3 milliards d’euros provenant du fonds italien pour le climat. L’Italie qui assure en cette année 2024, la présidence du G7, entend rallier ses partenaires, et l’Union européenne en premier lieu, à son Plan appelé à se renforcer et s’élargir.
Le président Saïed a saisi cette occasion pour développer sa vision des rapports Nord-Sud et des relations internationales, de la question migratoire, et, en tout premier plan, du rétablissement du peuple palestinien dans ses droits légitimes.
Palestine
D’emblée, il a entamé son intervention par interpeller les présents, et au-delà, la conscience internationale, sur « la guerre d’extermination menée par les forces de l’occupation sioniste en Palestine et contre le peuple palestinien. » « Il y a un ordre du jour que je tiens à respecter, mais il y a un ordre de nuit que je tiens fermement à vous dévoiler », a-t-il déclaré. Après avoir souligné l’ampleur du carnage perpétré, il a affirmé que « la paix ne saurait s’établir que par la libération entière de la Palestine, et l’instauration par le peuple palestinien d’un Etat pleinement souverain, avec Jérusalem pour capitale. » « Celui qui entend placer un peuple dans des appartements ou des immeubles, ou encore des carrés, a-t-il mis en garde, est comme s’il met sur la braise brûlante, davantage de bois, pour qu’elle s’embrase encore plus. »
Afrique
Les foyers de braise, a rappelé le président Saïed se sont également multipliés sur le continent africain, depuis les conventions de Berlin de la fin du XIXème siècle, et le demeurent encore, attisés dans la plupart des cas par des interventions étrangères. Au cours de moins de trois décennies, de nombreuses régions en Afrique ont connu plus de 25 guerres civiles. Le nombre des réfugiés et des déplacés devient difficile à recenser. Ceux des Africains qui ont succombé à la famine, aux pandémies et aux maladies, ne sont pas moins nombreux que les victimes des guerres. L’espérance de vie dans un des pays africains ne dépasse pas les 40 ans. Pourtant, a-t-il souligné, tous ces drames interviennent alors que le continent africain détient le tiers des richesse mondiales, soit 2.4 trillions de dollars américains, un montant appelé à croître davantage.
Le chef de l’Etat n’a pas omis de rappeler la multiplication ici et là des congrès dont n’ont émané que des déclarations restées sans suite effective, et où « chacun voulant en être la locomotive, alors que les pays africains sont réduits à des remorques, une fois dans telle direction, et autre fois dans l’autre. » « Gardant présent à l’esprit les échecs du passé et ses douleurs, a-t-il poursuivi, nous explorons un nouvel avenir, des relations avec l’Afrique, non avec le mental des véhicules remorqués, mais celui d’une locomotive conduite ensemble, dans la direction que nous traçons tous en vue d’une société humaine nouvelle, édifiée sur la justice, éradiquant toutes les causes de la discrimination, de la misère et de la pauvreté. »
« Le Plan Mattei n’est pas uniquement une coopération dans un ensemble de secteurs, a déclaré le président Saïed, mais une voie dans les deux sens, qui comprend plusieurs étapes, des étapes concernant les revendication légitimes de tout être humain, où se salue le nord avec le Sud, l’Afrique avec l’Italie, pour avancer d’égal à égal, la main dans la main, ouvrant une nouvelle page dans l’histoire. Nous ne jetons pas aujourd’hui les bases d’une infrastructure, mais nous contribuons de façon substantielle à l’élaboration d’une vision conceptuelle qui rompt avec d’anciens concepts désuets ou ouvrent de nouvelles perspectives, larges, plus élevées, où les êtres humains sont tous égaux, et sans un ordre privilégié des sociétés et états par rapport à d’autres. »
Migration
« Afin d’éradiquer les vraies raisons et causes de la migration clandestine vers l’Europe, il est plus que jamais impérieux d’adopter une « solution collective » à ce phénomène sans cesse grandissant, a plaidé le président de la République, Kais Saïed. Il a souligné par ailleurs, dans une déclaration à l’Agence TAP, le traitement de la question migratoire ne peut se faire que dans le cadre d’une « approche éminemment collective » et non « individuelle ou même sécuritaire », ajoutant qu’une conférence de haut niveau devrait se tenir prochainement afin de débattre des questions liées aux stratégies et programmes de développement à mettre en œuvre dans les pays africains. Le président Saïed a, en outre, souligné que la montée en puissance du phénomène de la migration irrégulière n’est pas hasardeux, pointant du doigt des réseaux criminels opérant un peu partout dans monde dans le trafic d’organes et la traite des êtres humains.
Pour le président Saïed, tant qu’il y a de l’espoir et de l’avenir, personne n’ose s’aventurer à quitter son pays à bord des embarcations de la mort à destination d’autres pays, dénonçant à ce titre les conditions inhumaines qu’endurent les migrants irréguliers."