Rachid Allagui: Un si grand peintre, célèbre…et peu connu
Pourquoi son œuvre avait-elle échappé, ainsi que son parcours, à notre connaissance? Rachid Allagui, 86 ans, célèbre dans le monde, très peu connu en Tunisie, installé à Cologne, en Allemagne, depuis 1986, vient nous surprendre. Son œuvre est exposée partout dans le monde. Le magnifique livre d’art que lui consacre Béatrice Dunoyer nous révèle un artiste pluriel et une œuvre si variée, si riche.L’enfant de Bab El Fella, dans les faubourgs de Tunis, où il est né le 15 juillet 1940, était fasciné depuis ses premières escapades à Bab Alioua par les artisans et peintres italiens qui fabriquaient des charrettes et des calèches. Ce qui l’impressionnait davantage, c’est la décoration des carioles, «avec des fleurs et des motifs géométriques aux multiples formes et couleurs», comme le mentionnera Béatrice Dunoyer. Une passion est alors née en lui, pour ne plus jamais le quitter.A 15 ans, Rachid Allagui sera alors inscrit en 1955 par son frère aîné Khemaies, qui avait découvert son penchant artistique, à l’Ecole des beaux-arts. Le pli est pris et le diplôme décroché. Avide de découvrir le monde et de s’imprégner d’autres cultures et expressions artistiques, il partira pour l’Egypte, puis l’Italie, avant d’aller parcourir l’Europe, en scooter…Rachid Allagui se posera en 1961 à Paris et s’inscrira à l’Ecole des beaux-arts. La France était alors en plein tumulte de la guerre en Algérie, et le Front de libération nationale algérien était très agissant. Allagui ne cachera pas son engagement en faveur de l’Algérie aux côtés du FLN. Sentant l’étau se resserrer autour de lui à cause de cet engagement, il décidera de s’installer en Allemagne, à Cologne plus précisément. Le hasard d’une hospitalisation le mettra face à son ange: une infirmière, Brigitte Auener, qui deviendra son épouse. Profitant de ce bonheur, il se consacrera à son art. Son talent sera alors en plein épanouissement.Rachid Allagui rentrera en Tunisie avec son épouse en 1965. Il sera recruté comme professeur, et donnera alors libre cours à son talent aux multiples facettes. De la création d’affiches à la conception de chars de carnavals et de stands de foires, en passant par la décoration intérieure et le design de meubles, il fera montre d’une expression variée et singulière. La peinture restera cependant son grand art de prédilection.Comme s’il voulait se donner de nouvelles ailes, Rachid Allagui commencera à réfléchir à sa réinstallation à Cologne. Il finira par s’y résoudre avec son épouse en 1986. De nouveaux horizons s’offrent alors à lui, il bénéficiera d’une bourse de résidence à la Cité internationale des arts à Paris. Ce qui lui permettra à la fois de mieux connaître de grands peintres, mais aussi d’enrichir ses expressions artistiques. Il voyagera aussi en Europe et visitera de grands musées. Sa décision est prise: de retour à Cologne, il ouvrira en 1990 sa propre galerie d’art en plein centre-ville. Son épouse décèdera en 2006. Le mektoub lui fera rencontrer en 2011 une céramiste originaire de Leipzig, Martina Köpping, qui deviendra sa seconde épouse.Le parcours personnel de Rachid Allagui est passionnant. Son œuvre est immense. Béatrice Dunoyer a le mérite de nous la révéler. Avec l’appui de la famille du grand artiste, notamment Sami, Ghazi et Mounira, elle nous livre, sur près de 140 pages en français et en anglais, un ouvrage de qualité, soigneusement imprimé (Simpact). Les textes raffinés épousent une illustration bien choisie d’œuvres impressionnantes. On découvre un parcours personnel et artistique surprenant, un talent exceptionnel.
Un ouvrage qui fera référence.
Rachid Allagui
de Béatrice Dunoyer
Tunis, octobre 2023,
142 pages
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