Le colza, une plante très avantageuse aux usages multiples
Par Ridha Bergaoui - Le colza (seljem en arabe سلجم ) est une plante oléoprotéagineuse (riche en huile et en protéines) au même titre que le soja ou le tournesol. Le colza est de la famille des brassicacées (Brassica napus L) anciennement appelées crucifères (fleurs à quatre pétales placées en croix). Les Canadiens ont sélectionné des variétés pauvres en acide érucique toxique appelées Canadian Oil Low Acid d’où la dénomination fréquente « Canola » attribuée au colza.
La culture du colza est actuellement en plein essor dans le monde en raison de ses avantages multiples sur les plans agronomique et nutritionnel. De nombreux pays ont adopté un programme de développement de la culture du colza dans une optique d’économie et de sécurité alimentaire.
Intérêt du colza
Au niveau mondial, les huiles végétales connaissent ces dernières années, une demande de plus en plus importante surtout pour leur utilisation comme sources de biocarburant (biodiésel). Par ailleurs, l’élevage intensif moderne est un grand consommateur de protéines végétales utilisées dans les aliments du bétail.
L’intérêt principal du colza, au même titre que le soja, c’est que d’une part on peut extraire une huile de qualité et d’autre part valoriser le résidu riche en protéines dans l’alimentation animale. Les graines de colza contiennent environ 45% de lipides. Quant au tourteau, il renferme prés de 35% de protéines (un peu moins que le tourteau de soja qui en contient 44 à 48%).
Le colza, un excellent précédent pour le blé
Il est connu depuis très longtemps que cultiver du blé plusieurs années de suite sur une même parcelle épuise le sol et favorise le développement des mauvaises herbes, des parasites et des maladies. Pour garantir une bonne récolte, il est indispensable de rompre les cycles des parasites et des adventices en effectuant une rotation des cultures ou assolement.
Dans ce sens, le colza représente une excellente tête d’assolement et un précieux précédent cultural pour le blé. En effet, les racines du colza sont très profondes et permettent une bonne restructuration du sol. Ces racines, qui peuvent aller jusqu’à 2 m de profondeur, sont capables de chercher l’humidité très profondément et de résister, mieux que d’autres cultures, à un manque d’eau. Après récolte, le colza laisse des résidus riches en matière organique représentant une bonne réserve nutritive pour les cultures suivantes.
La culture du colza nécessite le désherbage fréquent et la destruction des parasites. C’est une culture nettoyante qui laisse, après récolte, un sol propre avec peu de graines de mauvaises herbes. Des études montrent que le colza, en tête d’assolement, entraine une nette amélioration de la récolte du blé qui suit, comparée à une culture de blé sur blé.
Le colza, une plante polyvalente
Le colza est connu surtout pour son huile d’excellentes qualités nutritives destinée à la consommation humaine ou comme biodiesel et son tourteau riche en protéines utilisé dans l’alimentation animale.
L’huile de colza peut également être incorporée dans les aliments du bétail pour augmenter le niveau énergétique des rations (surtout pour le poulet de chair). Elle est utilisée de plus en plus comme biocarburant et se prête bien à de multiples usages industriels.
Des industries de l’agroalimentaire se lancent dans l’isolation et la production de protéines végétales issues du colza. Celles-ci sont utilisées pour l’élaboration d’une gamme de divers en substitution à la viande et aux protéines animales.
Certaines variétés de colza ont une excellente masse végétative et sont cultivées comme fourrage pour les animaux ou comme engrais verts.
Les champs de colza attirent de nombreuses espèces d’insectes pollinisateurs et d’oiseaux qui se nourrissent des insectes et des graines.
Le colza est considéré comme plante mellifère. Les fleurs sont riches en nectar et sont très appréciées par les abeilles. Le miel de colza est d’une grande finesse et se reconnait à sa couleur claire, presque blanche, et sa texture pâteuse. Il possède de nombreuses qualités nutritives et de multiples vertus thérapeutiques.
La paille de colza est également utilisée soit comme aliment pour compléter la ration des animaux soit comme litière. Des études récentes montrent qu’il est possible d’utiliser la paille de colza comme substitut intéressant pour la production, grâce à une bactérie lignocelluolytique (streptomyces lividans), de lipides utilisés comme biocarburants.
Enfin, tout est bon dans le colza. Fleurs, boutons et feuilles peuvent être consommées dans le cas d’une culture biologique qui n’a pas reçu de traitement chimique.
Les variétés modernes de colza
A l’origine, le colza était très peu utilisé en raison des éléments toxiques qu’il contient. En effet, les graines, comme toutes les crucifères, contiennent des glucosinates qui agissent comme moyen de défense contre les ravageurs. Ces glucosinates sont toxiques et peuvent entrainer des dégradations graves de l’état de santé des animaux qui consomment le colza. Par ailleurs, l’huile contenait de l’acide érucique, un produit très toxique pour l’homme. Pour cette raison l’huile était uniquement utilisée comme huile lampante.
Grace à la sélection végétale, les variétés actuelles (appelées variétés 00 ou double zéro) sont exemptes d’acide érucique et contiennent des taux négligeables de glucosinates. Le colza ne présente ainsi aucun risque de toxicité.
La plupart des variétés modernes sont également des hybrides, issues du croisement de lignées génétiquement éloignées. Les semences hybrides ont l’avantage de posséder un important effet hétérosis permettant une productivité et des rendements beaucoup plus « levés que les variétés conventionnelles. Toutefois, les graines issues de ces variétés ne peuvent être utilisées comme semences en raison de la disjonction des caractères aboutissant à une culture très hétérogène. L’agriculteur est obligé, chaque année, de s’approvisionner en semences sélectionnées. Compte tenu de la taille et du poids des graines, on compte qu’il faut au plus 4-5 kg de semence à l’hectare.
De nouvelles variétés appelées « clearfield » sont actuellement disponibles sur le marché. Ces variétés, obtenues par mutagénèse, sont tolérantes à certains types d’herbicides et permettent de lutter plus efficacement contre les mauvaises herbes. Considérées par certains comme semences OGM, ces variétés sont toutefois inscrites aux catalogues officiels et leur culture est autorisée dans la plupart des pays de l’Union Européenne.
Par ailleurs, l’huile de colza est riche en acides gras essentiels (oméga 3 et oméga 6) et vitamine E. A haute température ces acides gras sont oxydés et aboutissent à des produits nocifs. L’huile de colza normale est déconseillée pour les fritures. Ces dernières années, les sélectionneurs sont parvenus à produire des variétés résistantes aux hautes températures et adaptées aux fritures. Ce sont les variétés HOLL (High Oleic-Low Linolenic), stables à des températures élevées et convenant parfaitement comme huiles de friture.
Des pertes importantes de graines étaient observées, avec les anciennes variétés de colza, avec l’ouverture précoce des siliques avant et au cours de la récolte. Les nouvelles variétés sont désormais résistantes à l’égrenage et les pertes au cours de la récolte sont négligeables.
Des progrès génétiques très importants ont été ainsi réalisés ces dernières années en ce qui concerne l’amélioration de la productivité en graines, la teneur et la qualité de l’huile. La résistance à différents ravageurs et maladies, la résistance à la sécheresse ont été également des caractères sérieusement améliorés.
La culture du colza
La culture du colza est réputée contraignante en raison des nombreuses interventions techniques nécessaires. La maitrise de la culture demande un savoir faire important durant les différentes étapes : préparation du sol pour le semis, lutte contre les maladies et les mauvaises herbes, fertilisation et récolte.
Les rendements en graines et le taux d’huile dépendent de nombreux facteurs. On peut citer : la technicité de l’agriculteur, l’apport en fertilisants (surtout azote), la pluviométrie et l’apport en eau (surtout au début de la formation des siliques), la variété, l’efficacité du désherbage et a lutte contre les ravageurs, ainsi que des conditions climatiques.
La culture ne nécessite pas d’investir dans du matériel spécifique. Moyennent des ajustements et des réglages spécifiques, les engins utilisées pour les céréales (semoir en ligne, épandeur d’engrais, moissonneuse-batteuse…) conviennent parfaitement.
Une bonne maitrise de la culture permet d’obtenir des rendements importants (plus de 35 qx/ha) et d’avoir une culture intéressante comme tête d’assolement et économiquement très rentable.
Conclusion
Grace aux progrès de la sélection variétale et à la maitrise de la lutte phytosanitaire, la culture du colza revient en force. Elle est boostée par une demande mondiale de plus en plus élevée en huiles végétales et tourteaux. Ceux-ci connaissent une forte demande, ces dernières années, et les marchés sont constamment sous pression.
Dans les pays où il est difficile de réussir la culture de soja (Europe, Afrique…), le développement de la culture du colza permet de produire une huile alimentaire de qualité et un tourteau très apprécié pour l’alimentation animale. Elle permet ainsi de réduire les importations, la sortie de devises et la dépendance alimentaire de ces pays.
Le colza est une culture très intéressante pour la conservation et la qualité sol, la préservation de l’environnement et la biodiversité. Bien conduite, c’est une culture rentable pour l’agriculteur et profitable pour l’économie du pays.
Ridha Bergaoui
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Merci pour cet article. Il y a un aspect intéressant à développer, c'est celui du fourrage. Semé très tôt avec une irrigation de complément ou en profitant d'orages précoces, le colza s'avère un excellent fourrage à pâturer par les ovins et bovins. "L'Agriculture en Algérie. Ou comment nourrir 45 millions d'habitants en temps de crise" Editions l'Harmattan (Paris), 256 pages, octobre 2021. Extrait disponible sur Harmattan.fr . Service presse : 01 40 46 79 20 / Fax : 01 43 25 82 03 marie-anne.meunier@harmattan.fr