News - 27.07.2020

Reçue par le président Saïed, la ministre italienne de l’Intérieur, Luciana Lamorgese est « rassurée » quant à l’engagement de la Tunisie contre la migration clandestine (Album photos)

Reçue par Saïed, la ministre italienne de l’Intérieur, Luciana Lamorgese est « rassurée » quant à l’engagement de la Tunisie contre la migration clandestine

« Rassurée, mais consciente des difficultés du moment, tant en Italie qu’en Tunisie ! ». En visite éclair de quatre heures, lundi matin à Tunis, la ministre italienne de l’Intérieur, Luciana Lamorgese, a regagné Rome en début d’après-midi avec ce double sentiment. « C’est une visite qui a permis des clarifications nécessaires, de part et d’autre, et confirmé la volonté réciproque d’agir en commun face à la recrudescence effarante de la migration clandestine à partir des côtes tunisienne vers la Sicile », commente une source contactée par Leaders. « L’Italie a tenu à cette occasion, ajoute-t-elle à exprimer son plein soutien au gouvernement Mechichi en cours de formation et sa pleine disposition à lui apporter le concours sollicité en vue de renforcer la coopération bilatérale. »

Ce qui a le plus inquiété les autorités italiennes, et déclenché ce déplacement très court, c’est de voir 22 bateaux quitter en un même jour la région de Sfax pour déverser des centaines de migrants clandestins à Lampadusa. Ce qui les intrigue le plus, c’est l’impunité dont jouissent les passeurs à Sfax. Si le nombre de total de ces migrants s’est élevé depuis le début de l’année atteignant 5700 personnes à ce jour, il faut considérer que des flux massifs ont été enregistrés durant les tout derniers mois, mai, juin et juillet.

Déjà impactée par le Covid-19, l’Italie en général et la Sicile méridionale en particulier se trouvent plombées par ces exodes, véritables drames humanitaires. Non seulement la capacité d’accueil est saturée, mais aussi la précarité à laquelle sont confrontés les migrants clandestins renvoie une image réductrice de la Tunisie. Aussi, l’accroissement du nombre des clandestins et les mauvaises conditions de séjour ainsi que des comportements désinvoltes et incivils qui répugnent les touristes à se rendre en Sicile. Le mal est alors multiple : difficile reprise post—Covid-19, désaffection des touristes et crise humanitaire.

Certes, les autorités italiennes ont procédé à la régularisation de la situation des sans-papiers opérant dans le secteur agricole, dont des ressortissants tunisiens, mais il s’agit de ceux qui étaient déjà entrés depuis longue date sur le territoire italien et obtenu un travail dans les champs. Cette régularisation, tiennent à clarifier les autorités italiennes, ne saurait bénéficier aux nouveaux migrants et c’est ce qu’il faudrait expliquer.

Kais Saïed plaide en faveur d’une nouvelle vision tuniso-européenne

L’audience accordée par le président Kais Saïed à la ministre Luciana Lamorgese a été très appréciée du côté italien. Le chef de l’Etat a appelé à cette occasion à ne pas se limiter uniquement aux aspects sécuritaires dans la lutte contre la migration clandestine, mais de l’intégrer dans une nouvelle vision plus large, avec une approche spécifique quant aux facteurs de désespoir et de migration. Si le moment est difficile pour tous, c’est aussi le temps d’agir ensemble pour contenir les pressions, circonscrire leur impact et s’attaquer à leurs causes profondes, a-t-il affirmé en substance. Pour le président Kais Saïed, les échanges tuniso-italiens, sur cette question fondamentale gagneraient à engager un dialogue tuniso-européen, plus large et global. 

Ces propos ont été très bien accueillis par la partie italienne qui y a vu « une parfaite compréhension du contexte très particulier en Italie et une détermination à aller beaucoup plus de l’avant », « sans laisser des groupes criminels organisateurs de traversées clandestines porter atteinte à une longue et intense amitié entre les deux pays ».

Sans interprète

Avant de se rendre à Carthage, la ministre italienne de l’Intérieur avait eu long entretien en plusieurs séquences avec son homologue tunisien, Hichem Mechichi. La première séquence, avant l’entretien élargi aux deux délégations, a commencé dans la voiture qui les conduits ensemble de l’aéroport au ministère de l’Intérieur, puis au palais présidentiel, et enfin pour reprendre le chemin de l’aéroport. « Ces tête-à-tête sans la présence d’un interprète (Mechichi maîtrise l’italien) ont créé une proximité utile et facilité l’établissement de rapports directs cordiaux, rapporte notre source. Première personnalité officielle étrangère à se rendre à Tunis après la désignation de Hichem Mechichi pour former le nouveau gouvernement, Luciana Lamorgese n’a pas manqué de le féliciter à cette occasion et lui souhaiter plein succès. « Elle a trouvé auprès de lui attention, écoute et compréhension, avec également la proposition d’une série d’actions efficaces et immédiates, confie une source italienne à Leaders. La Tunisie, a-t-il indiqué, réalise pleinement l’ampleur du moment en Sicile et en Italie, plus généralement, ne compte pas baisser les bras et regarder sans brocher ce qui risque de s’y passer. Elle fera de tout son mieux pour endiguer ces flux et démanteler les réseaux impliqués. L’essentiel, c’est de favoriser le dialogue et d’exprimer l’engagement réciproque. »

Qu’en sera-t-il concrètement en termes d’aides supplémentaires au développement, de maintenance de patrouilleurs et vedettes surveillance côtière, de fourniture de nouveaux équipements et autres : rien n’a filtré à ce sujet. « Ce que la ministre italienne a le plus retenu de ce déplacement urgent et rapide, résume pour Leaders notre source, c’est la compréhension de la Tunisie à la grande problématique migratoire d’origine tunisienne et l’engagement plein et entier du président Saïed de conjuguer tous les efforts pour mettre fin à ces traversées clandestines. »

T.H.

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