News - 19.03.2020

Ahmed Friaa - Le Coronavirus : Quelles leçons en tirer

Ahmed Friaa - Le Coronavirus : Quelles leçons en tirer

Notre pays se trouve confronté, comme la plupart des autres pays, à une redoutable pandémie, causée par le désormais célèbre coronavirus. Cette pandémie inquiète à juste titre nos concitoyens, non pas tant en raison de sa gravité, d’autres types de virus sont plus redoutables et induisent un taux de mortalité nettement plus élevé, mais en raison de son fort pouvoir de diffusion parmi la population.  Ce qui, en l’absence de décisions draconiennes,  conduit à un nombre de personnes infectées en croissance exponentielle, entrainant rapidement une saturation des unités de soins et l’impossibilité matérielle de prendre en charge le restant des personnes infectées, ce qui naturellement met en péril leur survie.

Si bien que, face à un virus à fort facteur de diffusion, et on n’a pas besoin de grands spécialistes pour le confirmer, le bon sens recommande, parmi les mesures les plus urgentes, d’éviter au mieux les contacts physiques entre individus. Et comme le virus s’affranchit de toute contrainte géographique, sociale ou temporelle, cette mesure doit s’appliquer, indépendamment du lieu où l’on se trouve et de l’heure considérée. C’est ce qui rend caduque toute mesure du type couvre-feu ne concernant pas toute la journée. Les grands pays n'ont d’ailleurs pas pris une telle mesure. Ils ont en revanche, et à juste titre, pris des mesures de nature à éviter le regroupement d’individus et encourager le confinement et le travail à distance, à chaque fois qu'il est possible.

Evidemment, cette mesure, qui peut aller jusqu’au confinement de la population d’une région ou de toute la population d’un pays, comme ce fut le cas en Chine, en Italie et ailleurs, et malgré son importance, n’est certes pas suffisante. Elle doit être consolidée par d’autres mesures aussi nécessaires. Certaines de ces mesures sont urgentes, d’autres sont d’ordre stratégique.

Concernant les mesures urgentes, il convient de mettre en place toute une stratégie et mobiliser les ressources humaines et matérielles nécessaires à sa mise en application, pour  accueillir et soigner au mieux les personnes infectées, protéger les personnes à risque, les personnes nécessiteuses, le personnel soignant, médical et paramédical, de même que les personnels des forces de sécurité et des forces armées. Il convient à cet égard, de rendre hommage à tous ceux qui, malgré des moyens limités, font preuve de bravoure, d’abnégation et d’un sens aigu de la responsabilité pour soulager la souffrance des malades et lutter contre cette maudite pandémie. Il convient en outre de prendre des mesures urgentes, courageuses et ambitieuses, pour venir en aide aux entreprises qui ne manqueront pas d’être impactées par cette pandémie et par le ralentissement des activités économiques, y compris à l’échelle internationale. Il est de notre devoir à tous de sauvegarder notre tissu économique et les centaines de milliers d’emplois qu’il génère. A cet égard, il convient de se dessaisir des dogmes d’une économie politique dépassée et bien comprendre que toute politique dont la finalité est autre que l’homme et son bien être est vouée à l’échec et à la déchéance.

Pour ce qui relève de la stratégie, il est temps de comprendre que la seule voie pour permettre à nos concitoyens de rêver à un avenir meilleur, est la voie du savoir. On le constate à l’occasion de cette pandémie. Tout le monde est dans l’attente d’un remède ou d’un vaccin pour combattre ce virus et on imagine les sommes colossales qu’engrangera le pays qui arrivera le premier à relever ce défi, par une efficiente maitrise du savoir. De même, les équipements et les médicaments qui permettent de traiter les symptômes de l’affection sont fortement demandés à l’échelle mondiale et certains produits connaissent une pénurie. D’où la nécessité de mettre en place une politique nationale en vue de prémunir notre pays, au mieux possible, contre toute subordination à l’étranger pour des produits touchant à la santé et à la vie de nos concitoyens.

C’est pourquoi, je propose la création d’un institut national de recherche dans les domaines stratégiques, doté d’un mode de gestion souple et flexible et d’une grande autonomie, qui sera chargé de deux missions principales notamment :

1- Assurer une veille scientifique et technologique, en vue d’éclairer les pouvoirs publics quant aux évolutions rapides que connait notre monde contemporain et leurs impacts sur notre société et notre économie.

2- Mener des recherches dans les domaines stratégiques et particulièrement dans les domaines touchant à la santé de nos concitoyens et l’avenir des générations futures.

A cet effet, cet institut regroupera la fine fleur de nos élites dans les différentes spécialités, fera appel à nos cadres et chercheurs qui exercent à l’étranger et tissera des relations de partenariat avec les centres de recherche similaire à l’étranger.

De tels instituts existent dans des pays étrangers et leur efficacité est prouvée, à condition de les extraire à toute rigidité administrative et veiller, dans les conditions de recrutement du personnel, au respect de deux conditions majeures : la compétence et le dévouement à l’intérêt national.

Je finirai par réitérer l’appel suivant aux autorités concernées : Le devoir national recommande de mettre la sauvegarde de la santé des Tunisiens au-dessus de tout autre considération. Prenez des mesures urgentes pour éviter au plus les contacts entre individus et rassurez nos opérateurs économiques en proposant un vrai soutien aux entreprises qui ne manqueront pas d’être impactées par cette pandémie qui risque de durer encore pour quelque temps et mobilisez nos chercheurs pour mettre au point du matériel désinfectant. Nous avons encore, heureusement, de bons spécialistes en robotique, en mécatronique et dans les autres spécialités pour pouvoir atteindre un tel noble objectif.

Et, que Dieu préserve notre chère patrie.

Pr. Ahmed Friaa