Hatem Kotrane: Ce que Elyes Fakhfakh, a omis de dire!
Gouverner, c’est prévoir et faire montre de clairvoyance et d’anticipation ! Certes, le chef du gouvernement, Elyes Fakhfakh, en s'adressant vendredi soir aux tunisiens au sujet de l’épidémie de Covid-19, a-t-il été avisé en annonçant le passage, à titre préventif, au niveau 3 de la riposte et la prise d’une série de mesures restrictives pour tenter d’endiguer la crise en anticipant les mesures qui seraient rendues autrement plus insupportables. Mais comment expliquer, par exemple, qu’aucune mesure tangible n’ait été annoncée, à l’instar des mesures prises la veille par le Président Emmanuel Macron, et l’avant-veille par Donald Trump, consistant en la mise en place d’un système de chômage partiel et un report pour les entreprises le souhaitant du paiement des impôts et cotisations.
Le Chef du gouvernement n’aurait-il pas été avisé en annonçant la mobilisation générale pour l'économie et les emplois.
«Nous n'ajouterons pas à la crise sanitaire, la crise des fins de mois, la peur des entrepreneurs», avait prévenu la veille Emmanuel Macron en mettant en exergue une priorité : préserver les emplois.
Certes, l’on ne peut comparer que ce qui est comparable ! Un mécanisme exceptionnel de chômage partiel aurait été pourtant nécessaire à mettre en œuvre pour éviter les licenciements. Un programme national de solidarité économique et sociale aurait gagné à être annoncé en vue de prendre en charge l'indemnisation des salariés contraints de rester chez eux. De plus, afin de protéger toutes les entreprises, y compris les travailleurs indépendants, le Chef du gouvernement aurait été avisé en annonçant la possibilité de reporter le paiement des cotisations et des impôts dus dans les tout prochains mois. Des procédures que la Kasbah pourrait rendre simples, sans trop de formalités.
Le télétravail, un enjeu crucial
De leur côté, les entreprises auraient dû –et pourraient encore– être appelées à permettre aux employés dans certaines entreprises de travailler à distance.
Avec les crèches et les écoles fermées, favoriser le télétravail devient un enjeu crucial pour ne pas ralentir davantage l’économie.
Elyes Fakhfakh aurait été avisé en plaidant enfin pour un plan de relance tunisien auquel le gouvernement est appelé à travailler, y compris avec l’aide de la Banque mondiale, du FMI, de ses partenaires européens, arabes et autres. Cette réponse à la crise se fait toujours attendre.
Aux grands maux les grands remèdes
Elyes Fakhfakh aurait été avisé en annonçant des mesures que l’État s’engagerait à prendre en vue de l’indemnisation des salariés placés en chômage partiel, quel que soit leur niveau de rémunération.
La mesure, annoncée la veille par Emmanuel Macron, pèserait, certes, lourd sur la balance d’une économie tunisienne déjà aux abois. Elle devrait pourtant être envisagée dans le cadre de la solidarité nationale, quitte à engager des négociations nationales en vue d’en définir les différentes implications.
«A attendre que l'herbe pousse, le bœuf meurt de faim»
Autant de mesures à définir, à prévoir, qui auraient permis de rassurer les tunisiens quant à la capacité du Chef du Gouvernement à assumer pleinement le leadership, comme levier de bonne gouvernance ! Car, au-delà de la lutte en vue d’endiguer la crise de l’épidémie de Covid-19, l’occasion était offerte de relever ce nouveau défi, celui de l’expression citoyenne, singulièrement appauvrie, et qui n’a plus d’autres possibilités que de se manifester de façon solidaire face à la crise.
Ayez et donnez confiance, Monsieur le Chef du Gouvernement, le succès viendra avec l'implication et l'effort de tous!
«Ayez la volonté et la persévérance, et vous ferez des merveilles!» (Benjamin Franklin).
Hatem Kotrane
Professeur en droit