Khemaies Jhinaoui, pressenti pour succéder à Ghassan Salamé : La Tunisie fière de contribuer à la sortie de crise en Libye
Une grande opportunité se dessine pour la Libye et, aussi, la Tunisie. Le fait même que de grandes puissances envisagent de proposer l’ancien ministre des Affaires étrangères, Khemaies Jhinaoui, en tant que nouvel envoyé spécial des Nations unies pour la Libye, est fort significatif. Alors que tant de prétendants soutenus par divers pays se bousculent aux portillons, nos chances sont sérieuses. Non seulement le choix du diplomate tunisien, s’il se confirme, remet notre pays sous les radars, avec tous les avantages qu’il peut lui procurer, mais il place aussi aux commandes un diplomate chevronné à même de faire progresser le dénouement de la crise libyenne. Décidément, le Président Kais Saïed est servi par la chance. La Libye aussi et elle le mérite.
Une relève nécessaire
Ereinté par tant de tiraillements internes et d’ingérences externes, l’ancien titulaire du poste, Ghassan Salamé a fini par jeter l’éponge. A raison, il a compris qu’il ne pourra rien apporter de plus. L’embrasement encore plus endiablé, les massacres attisés par des forces armées étrangères, privées ou masquées, en Libye et le non-respect des résolutions de la Conférence de Berlin, le 19 janvier dernier, l’ont convaincu de son impuissance dans cette mission.
L’Allemagne en chef de file de la Conférence de Berlin, et d’autres pays membres du Conseil de sécurité, fort préoccupés par l’enlisement encore plus dangereux en Libye, ont eu la sagesse de songer à la Tunisie en la personne de Khemaies Jhinaoui.
Les raisons d’un choix judicieux
Voisin immédiat le plus impacté directement par les dommages collatéraux, la Tunisie a gardé dès le déclenchement de la crise libyenne une position modérée, en dehors des axes en présence. Prônant une solution politique et non militaire, inter-libyenne, inclusive de toutes les parties concernées, en dehors de toute interférence étrangère, elle a vu son approche confirmée dans sa justesse.
Il faut dire que ce n’est pas la première fois que la diplomatie tunisienne offre à la communauté internationale, sous la bannière des Nations Unies, des diplomates qualifiés, et quand il l’aura fallu, des forces armées et sécuritaires (en casques bleus), lors de grands conflits dans le monde.
Mongi Slim, premier président arabe et africain de l’Assemblée générale de l’ONU, l’armée tunisienne au Congo, et dans 12 autres pays, comme tout récemment au Mali, la Police Tunisienne en Namibie, Centrafrique, Côte d’Ivoire mais aussi feu Hédi Annabi, envoyé spécial de l’ONU à Haïti qui a payé de sa vie lors du tremblement de terre, en janvier 2010 dans ce pays) son dévouement à sa mission, perpétuent une noble lignée.
Khemaies Jhinaoui, s’y inscrit, fort de plus de quarante ans de service diplomatique (Inde, Corée, Russie, Royaume Uni, Direction générale Europe, chef de cabinet, jusqu’à ministre). Fin connaisseur du dossier libyen qu’il a géré directement durant les cinq dernières années, nouant de solides relations de confiances avec tous les acteurs significatifs sur le terrain et les pays concernés, il sera opérationnel dès le premier jour de son entrée en fonction.
L’appui du pays d’origine, non exigé, mais sera un plus
Le processus de nomination qui relève de l’initiative exclusive du Secrétaire général de l’ONU (Antonio Guterres) à le soumettre à l’approbation du Conseil de sécurité, n’obéit pas à un simple appel à candidature ouvert aux pays membres et/ou à des candidats potentiels. Il repose sur des « suggestions » et de concertations, comme il s’agit c'est le cas en l'occurrence. Evidemment, l’appui du pays dont est originaire la personne pressentie, sera un plus. Encore plus, lorsqu’il s’agit d’un Tunisien. Difficile de croire qu’un autre candidat tunisien « officiel », ait de réelles chances de l’emporter. Le poste échappera pour aller ailleurs.
Un rôle important pour le Président Saïed et la diplomatie tunisienne
Kais Saïed en réalise sans doute les enjeux. D’abord pour l’intensification des efforts concertés en vue d’arrêter le bain de sang en Libye, c’est-à-dire à nos portes, et d’engager sur des bases solides le dialogue inter-libyen. Une grande assurance de sécurité pour la Tunisie. Mais, aussi, la première conséquence sera l’amorce de la gigantesque œuvre de reconstruction dans ce pays frère et voisin, avec une première enveloppe de 150 milliards de dollars réservée sur les fonds gelés.
Remise en selle sur le dossier libyen, la Tunisie ne s’en trouvera que confirmée dans son rayonnement diplomatique, suscitant davantage l’attention des grandes puissances, voyant ses requêtes financières accueillies plus favorablement par les bailleurs de fonds. Notre pays qui sera investi de la redoutable mission de conduire la Libye vers sa sécurité et sa stabilisation bénéficiera d’une plus grande reconnaissance internationale.
L’envoyé spécial de l’ONU en Libye, tenu de présenter chaque mois un briefing au Conseil de Sécurité dont notre pays est membre, ne fera que conforter la mission de notre ambassadeur qui y siègera et son rôle dans la plus haute instance des Nations-Unies chargée de la paix et de la sécurité mondiales.
Le président Kais Saïed aura dans ce processus un rôle actif à jouer, lui qui a déjà amorcé le dialogue avec des représentants de tribus libyennes, et un plan de réconciliation nationale. Agissant en homme d’Etat, insensible aux intrigues d’anciens et actuels courtisans, il sait placer l’intérêt supérieur de la Tunisie au dessus de toute considération. En démineur comme il l’avait prouvé lors de sa campagne blindée par le peuple à l’élection présidentielle, et édifié quant aux manœuvres de torpillage de l’opportunité qui s’offrent à la Tunisie sur le dossier libyen, il réalise sans doute qu’elles visent, sous l’effet d’une manipulation interne, voire de certaines parties étrangères, au-delà de la personne de Jhinaoui, le président lui-même, la Tunisie et la Libye. Ceux qui s’agitent pour l’avorter attentent à la paix en Libye et, par ricochet, aux intérêts de la Tunisie, servant de vils et intérêts de marchands d’armes et de trafiquants de pétrole au détriment du peuple libyen.
La plus importante mission de l’ONU à l’étranger et un impact très positif sur la Tunisie
Une chance sérieuse s’offre aujourd’hui. La Tunisie sera encore une fois fière de la confiance internationale placée en l’un de ses fils. La Mission de soutien des Nations Unies pour la Libye (UNSMIL) (qui a un siège principal à Tunis et des bureaux en Libye) est déjà la plus grande mission implantée à l’étranger. Elle le restera, et sera peut-être renforcée avec la perspective d’envoi de casques bleus, de force sécuritaires et d’équipes pour engager la réforme et la sécurité. Plus tôt on s’achemine vers la sortie de crise en Libye, plus tôt, les compagnies étrangères de reconstruction et de formation, offriront de grandes opportunités pour les entreprises et les travailleurs tunisiens, Ben Guerdane et tout le Centre-Sud en seraient les premiers bénéficiaires.
Toujours disposée à apporter sa contribution à la communauté internationale, la Tunisie aura l'occasiond' exprimer concrètement son adhésion agissante à la paix et la sécurité dans le monde.
Tel est sans doute le vœu le plus ardent des Tunisiens.