News - 02.02.2020

Ce grand lundi que redoute Elyès Fakhfakh face aux 10 chefs de parti pour former sa coalition

Ce grand lundi que redoute Elyès Fakhfakh face aux 10 chefs de parti

Ce lundi 3 février à 15 heures, dix chefs de partis, Rached Ghannouchi et SelimAzzabi (au nomde Tahya) en tête, prendront place autour de la table ronde dressée dans la grande salle de Dar Dhiafa, à l’invitation d’Elyès Fakhfakh. L’ordre du jour est la formation de la coalition gouvernementale sur la base de la note conceptuelle de programme devant servir de plateforme contractuelle. Cet objectif « technique », s’agissant de la validation d’un programme (ouvert à enrichissement) est cependant plombé par un aspect politique fondamental : l’élargissement du cercle des partis à impliquer. D’emblée, Fakhfakh en avait écarté Qalb Tounes (Nabil Karoui) et le PDL (Abir Moussi).

D’une même voix, mais en des termes légèrement différents - juste du wording, relève-t-on – Ennahdha et Tahya Tounès ont appelé le chef de gouvernement nominé à revenir sur cette exclusion. Ils ne sont pas les seuls. Sa lettre de désignation mentionne bien le respect de la volonté des électeurs, or ces deux partis viennent en 3ème position pour Karoui avec 38 députés et 5ème position pour Moussi avec 17 sièges au Bardo. Si le PDL a récusé l’invitation de Fakhfakh, Qalb Tounès n’a pas fermé la porte et c’est surtout de lui qu’il s’agit.

Après un weekend dlaborieux avec son "dream team" (en photo)et d'intenses conciliabules avec différents relais, Fakhfakh, qui a dégagé son agenda de tout rendez-vous, poursuivra ses approches toute la matinée du lundi pour d'ultimes ajustements. Sa marge de manoeuvres est cependant réduite. Tant de facteurs qu'il ne maitrise pas tous, sont en effet déterminants.

Flexibilité et sens politique

Toute la question est de savoir si Elyès Fakhfakh va prêter écoute au bannissement de l’exclusion, et y donner suite favorables, sans aller dans des conditions rédhibitoires ? Pour Ennahdha, l’enclavement au sein d’une nouvelle alliance dominée par Ettayar et Echaab ne dessert ni sa vision ni ses intérêts, d’autant plus que cet axe nouveau pourrait séduire d’autres partis. Tahya Tounès est lui aussi à la manœuvre craignant son isolement ou du moins le laminage du rôle prépondérant qu’il entend jouer.

Confiance et garanties

Le grand enjeu de la réunion de ce lundi des 10+1 est la confiance. Quel degré de confiance les partis significatifs pourront-il accorder à Fakhfakh et quelles garanties exigeront-ils de lui. La réciproque est vraie. Echaudé par la mauvaise expérience de son prédécesseur à Dar Dhiafa, Habib Jemli, Elyès Fakhfakh doit certainement se poser lui-aussi les mêmes questions vis-à-vis de ses interlocuteurs.

Son plan optimiste est de parvenir à obtenir l’accord des dix. Quitte, en ultime négociation et repli stratégique, à tendre la main à Nabil Karoui. Certains le poussent cependant, confiants en un vote nécessairement favorable au Bardo, à un plan B, reposant sur un gouvernement de compétences nationales, ce qui est peu probable. Fakhfakh n’ignore pas le risque de cet entêtement qui le bloquera par la suite, s’il obtient l’investiture et pourrait lui valoir une motion de censure au bout de quelques mois, en plus le blocage de tous ses projets de lois.

Des ministères aux enchères, selon les compétences ?

Quant au mode opératoire choisi, la prochaine étape sera celle de la formation du gouvernement. Sur quelle base ? Des quotas et des revendications à négocier en entretiens bilatéraux ? Puis, les valider en plénière ? L’autre démarche qui lui est proposée est de mettre aux enchères chaque poste. Une fois la plateforme programmatique contractée, et au vu des plans d’action nécessaires à élaborer (vision régionale et sectorielle en plus), ainsi que son chiffrage financier à établir, il s’agit d’identifier les personnes idoines pour les réussir. Cette approche plus efficiente serait-elle acceptable pour les futurs co-équipiers de Fakhfakh?

Ce grand lundi sera important, à suivre de près. Ce qui se passera à Dar Dhiafa dépendra largement de l’attitude de la puissance invitante, c’est à dire sa flexibilité et son sens politique, mais aussi du comportement de ses invités et de leurs intentions réelles. Ça ne sera qu’un premier round. La dernière ligne droite est encore difficile à aborder.