Opinions - 20.09.2019

Faouzi Mili - Présidentielles: le duel acharné entre les électeurs et le juge d’instruction

Présidentielles: le duel acharné entre les électeurs et le juge d’instruction

Quand une décision de justice menace lourdement les présidentielles…..

Nous sommes tous pour l’Indépendance de la justice. Ce qui veut dire que le juge est souverain dans ses décisions et ne reçoit d’instructions de personne.

Mais par ailleurs le juge doit être neutre vis-à-vis des candidats aux élections présidentielles.

Ce qui veut dire qu’il lui est interdit, sous le couvert d’une instruction en cours, et sauf prescription légale incontournable, d’empêcher un candidat de mener sa campagne électorale après être passé au 2eme tour des élections par la volonté des électeurs.

Car il s’agit alors d’un véritable duel entre les électeurs et le juge, entre la ‘’souveraineté du peuple’’ et le pouvoir judiciaire délégué au juge par ce même "peuple" au nom duquel il rend d’ailleurs expressément ses décisions.

Il y a donc un gros enjeu et nul ne peut soutenir que le juge, de par ses fonctions, n’en a pas parfaitement conscience!

Parfaitement conscience que sa décision constitue un précieux cadeau fait à ce prévenu qui, devenu héros malgré lui, emportera tous les suffrages.

Sinon un cadeau non moins précieux  fait à l’adversaire qui l’emportera par forfait. Mais qui fragilisera par ailleurs son autorité avec les effets sur les institutions qui pourront être désastreux pour le pays !

Donc dans  les deux cas, cette décision pèsera très lourd sur les élections et les faussera. 

Vous êtes censé le savoir Monsieur le juge.

Et vous ne pouvez pas justifier votre décision par la loi ou par le science juridique:

Au stade de l’instruction, la décision de refus de mise en liberté d’un prévenu en détention préventive n’a rien à voir avec la loi, car elle n’est jamais déterminée par des motifs de droit pur.

Selon la loi elle-même elle ne sert qu’à empêcher la fuite du prévenu. Elle est donc rendue en pure opportunité sur la base des faits et rien d’autre que les faits. Or les faits sont clairs et indiscutables, et leur appréciation à la portée des plus illettrés:

Le candidat au 2eme tour des élections présidentielles actuellement contraint à déléguer sa campagne électorale à son staff, n’attend que de l’assurer par lui-même. En tout cas il n’attend pas la sortie de sa geôle pour fuir sa campagne et le pays !

Cela vaut-il la peine de faire échouer ainsi tout un processus électoral au bout d’une décennie de martyre et de souffrances ?!!

Il ne vous appartient pas, Monsieur le juge, de mettre à terre cet édifice si chèrement mis sur les rails.

Rassurez-vous, l’auteur de ce modeste avis se déclare ouvertement aux antipodes de ce prisonnier … Son seul parti pris étant d’éviter le discrédit du processus électoral et de sauver les lendemains immédiats de notre Tunisie déjà suffisamment malade…..

Aujourd’hui même, des voix se sont fait entendre dans le même sens, malheureusement venues de l’extérieur ……. d’où l’on continue à vouloir nous donner des leçons …….

De là à ce que l’on nous " dicto-suggère " la mise en liberté, il n’y a qu’un pas…..peut être déjà franchi !

Votre alibi d’indépendance, Monsieur le juge, est en train de malmener jusqu’à l’indépendance de notre pays et de ternir lourdement son image.

Faouzi Mili
Avocat