Mohamed Ennaceur: On ne s’attaque pas aux symboles
La descente aux enfers de l’invective et de l’outrage, sous la coupole du Bardo, a été consternante. Aucun des trois symboles de l’Etat n’y a échappé. Ni le président de la République, ni le Chef du gouvernement, ni le président de l’Assemblée des représentants du peuple. Le débat avec le gouvernement, puis l’examen de la prolongation ou non du mandat de l'Instance Vérité et Dignité (IVD) se sont transformés en graves attaques personnelles, dans le total irrespect des hautes institutions et de ceux qui les incarnent. La démocratie en a pris un sacré contrecoup.
Jamais, on n’aurait imaginé que nos députés ou la majorité d’entre eux, toutes tendances confondues, pouvaient aller aussi loin dans l’ignominie et l’opprobre. Certes, tous les parlements du monde y compris les plus vieilles démocraties du monde, connaissent des séances houleuses, mais dans le cas d'espèce,toutes les les lignes rouges ont été franchies. Menacer le chef du gouvernement Youssef Chahed, glorifier le terrorisme, abreuver le président du parlement, Mohamed Ennaceur, d’insultes et porter atteinte à son honneur, relèvent de l’inadmissible. L’indignation des Tunisiens n’en est que plus forte. Ces députés étaient-ils conscients du préjudice qu’ils portaient à l’Assemblée et à la démocratie ?
Ceux qui connaissent le président Ennaceur, l’un des plus jeunes gouverneurs de la République (les 3 gouvernorats du Sahel), fondateur de l’Office de l’Emploi, de l’Emigration et de la Formation professionnelle, ministre des Affaires sociales, artisan de la politique contractuelle, démissionnaire du gouvernement à la veille du 26 janvier 1978, président du Conseil économique et social et représentant permanent auprès de l’ONU, savent de quelles nobles valeurs il est nourri et de quelles patriotiques intentions il est animé. Remettre en cause ses compétences et s’attaquer à son honneur participe de la plus basse abjection. Rien en fait n’explique cet acharnement à son encontre, sinon l’obsession de défendre l’indéfendable, et la folle transe de passer en force. Les masques sont tombés. Le verdict des urnes, refusant la prolongation du mandat de l’IVD, sera cinglant.
Néanmoins, ces graves dérapages ont le mérite de mettre fin à cette supercherie nommée «tawafek», dont on nous a rebattus les oreilles depuis 2014. On dit que les accords les plus solides sont ceux qui se font entre les arrière-pensées. Et en l’occurrence, ce n’est pas le cas. Après ces trois journées où on s’était invectivés avec des mots qui semblaient sortir du fin fond de leur être, on imagine mal que des dirigeants des deux partis, Nidaa et Ennahdha, puissent désormais, s’asseoir à la même table, même si le président d’Ennahdha s’est dit confiant en l’avenir de cette coalition.