Zohra Driss : Ennahdha veut phagocyter Nidaa, Hafedh Caïd Essebsi et Sofiane Toubal doivent partir…
« J’appelle le président Béji Caïd Essebsi à écarter son fils de la direction de Nidaa Tounes, et d’entreprendre, en ultime sauvetage, le recentrage du parti sur ses principes fondateurs ». Mais, encore : « L’accord entre Ennahdha et Nidaa, sans consultation des députés, est scellé pour apporter une immunité à certains députés des deux partis ». Jusqu’à dire : « Ennahdha et Nidaa ne sont pas les seuls impliqués dans la malversation. Il y a aussi d’autres partis politiques, comme ceux qui faisaient partie des gouvernements de la Troïka. » Puis: «Youssef Chahed ne doit pas subir le même sort qu'Habib Essid».
Elle aussi a, en plein ramadan, bouffé du lion. Zohra Driss, députée Nidaa (circonscription de Sousse), mais aussi figure de proue de l’UTICA (présidente d’un important groupe hôtelier, et chargée des relations avec le Medef) a fini par se lâcher. Connue pour son franc parler, elle évitait jusque-là de s’épancher dans les médias. Cette fois, ce sera la totale. Dans une interview à notre confrère Assabah, elle affirme « qu’il est temps de changer le président du groupe parlementaire de Nidaa (Sofiane Toubal), tant il a persisté dans la prise de décision sans revenir aux députés du parti à telle enssigne qu'il était devenu quasi-impossible de travailler avec lui. »
"Des opportunistes"
Zohra Driss déplore la rétrogradation de Nidaa de sa position de premier parti issu du scrutin de 2014 et met en garde contre sa phagocytose par Ennahdha. « Nous devons faire vite, appelle-t-elle si nous ne voulons pas que notre parti disparaisse. C’est Ennahdha qui gouverne aujourd’hui, avec la bénédiction de Nidaa. Nous avons accepté la coexistence imposée par le verdict des urnes et je ne suis pas contre la participation d’Ennahdha au gouvernement, mais lui laisser la bride sur le cou jusqu'à mettre la main sur un grand nombre de projets de loi, m’est insupportable, d'autant plus que tous ceux qui s'y opposent se verront exclus du parti. »
Driss estime qu’à l’origine de l’affaiblissement de Nidaa, l’hémorragie provoquée dans ses rangs par le départ de nombre de ses fondateurs et de hauts dirigeants. Elle pointe du doigt l’arrivée de nouvelles recrues qui, prévient-elle, « ne sauraient prendre la place des fondateurs. Ils sont venus non pour sauver Nidaa et son repositionnement en première place, mais à des fins opportunistes».
Youssef Chahed ne doit pas subir le même sort qu'Habib Essid
Les bons points ne manquent cependant pas dans les propos de la Députée Nidaa de Sousse. Elle les décerne à Youssef Chahed et « certains » de ses ministres. « Il font du bon travail et nous devons les soutenir pour persévérer sur cette voie », dira-t-elle. « Youssef Chahed a eu le courage de s’attaquer de front à la malversation. N’est-il pas malheureux de voir cependant certains œuvrer à briser cet élan de peur d’être personnellement impliqués ». Zohra Driss, bien édifiée par des expériences précédentes, se référant à la capacité de nuisance de certains lobbies ne cache pas ses craintes. « Je ne souhaite pas que Youssef Chahed subisse le même sort que celui qui a été fatal à Habib Essid».
L’autre bon point, elle l’octroie à la diplomatie tunisienne, plus particulièrement, aux positions prises récemment au sujet de la crise des pays du Golfe. « La Tunisie a bien fait de ne pas s’aligner sur telle ou telle partie. Nous avons toujours fait preuve d’indépendance et de clairvoyance».