News - 01.09.2016

Fadhel Moussa : «Seul ton cil te pleurera, seul ton ongle te grattera»

Seul ton cil te pleurera et seul ton ongle te grattera

Le texte joint, sous forme d’introduction et de réponses à 3 questions, est une contribution à la Conférence de Rimini pour l'amitié entre les peuples. En marge de la foire de Rimini en Italie qui s'est tenue du 19 au26 aout sur le thème général « Tu se bene per me» (L'autre est un bien pour moi), cette conférence était organisée en l'honneur de la Tunisie sur le thème « La société construisant la paix : l’exemple tunisien ». Ce panel auquel avaient été conviés Fadhel Moussa, ancien Doyen de la Faculté ses Sciences juridiques, Politiques et Sociales de Tunis et Fadhel Mahfoudh, bâtonnier et prix Nobel de la paix du côté tunisien, ainsi que Tania Groppi, professeur à l’université de Sienne a été modéré par Andrea Simoncini  professeur à l’université de Florence.

Le Doyen Moussa y a fait une intervention intéressante que nous reproduisons ci-après, avant de répondre aux questions d'Andrea Simoncini:

Cordiali saluti a tutti voi

Cher président, avant de répondre aux questions je souhaite livrer mon point de vue sur le thème général: «L’autre est un bien pour moi» retenu pour cette 37e édition de la rencontre de Rimini pour l'amitié entre les peuples. Je souhaite l’aborder sous une forme interrogative et personnelle: est ce que l’autre est un bien pour moi? A cette question je réponds d’entrée: Bien sûr et sans aucun doute. En effet je considère que mes collègues et amis les professeurs Tania Groppi et Andrea Simoncini sont un bien pour moi tout comme je le suis pour eux. Ils n’ont pas manqué de me le manifester tout au long de la préparation de cette conférence sur la Tunisie que nous avons conduit ensemble depuis décembre 2015. Sa programmation à la journée d’ouverture inaugurée par le président de la république italienne S.Matarella l’atteste encore plus.

Mais si je quittais le contexte  de cette solidarité et de cette camaraderie universitaires  et  me plaçais dans le contexte suggéré par le titre de cette session spéciale sur la Tunisie, je me dois de dire que  la société tunisienne réagira vraisemblablement par le rappel d’un proverbe tunisien: «Seul ton ongle te grattera et seul ton cil te pleurera». En d’autres termes on ne doit compter que sur soi même.

En effet il y a chez nous un ressentiment à l’endroit de l’atlantisme en général et de l’Union européenne en particulier. On pensait que la Tunisie qui a  fait une révolution et qui a fait une transition démocratique réussie méritait un meilleur sort par un plus grand soutien économique, financier, sécuritaire et militaire. Un sort à la mesure des louanges qui lui ont été adressées pour cet exploit exemplaire qui lui a valu pas moins que le prestigieux prix Nobel de la Paix et qui a prouvé, et j’aime le répéter, qu’une seule hirondelle peut entretenir l’espoir d’un printemps arabe. Mais pour cela nous devons veiller à faire réussir irrémédiablement le notre.

Il convient de souligner que si les Tunisiens sont considérés modernes, ouverts guidés par la raison  ils ont aussi des relents orientaux et sont guidés de même par le cœur, les sentiments et l’angélisme. Ils espéraient ingénument en contre partie de leur exploit historique un soutien plus que verbal et honorifique.

Ils espéraient être aidés à récupérer les biens mal acquis sous l’ancien régime et placés à l’étranger. Ils espéraient que le dossier des dettes odieuses avérées contractées par l’ancien régime soit au moins ouvert. Ils espéraient  une conversion significative de la dette dans des projets de développement. Ils espéraient une aide substantielle et significative. Ils espéraient un plan Marshall pour consolider cette expérience.

Ceci étant indiqué je suis peiné de dire que la Tunisie arrive difficilement à boucler les fins des mois cette année et 2017 sera plus problématique encore. Je noterais un signal encourageant venu des députés de la commission des affaires étrangères du Parlement européen qui ont convenu, il y a peu de temps, que «La situation actuelle de la Tunisie justifie la mise en œuvre d’un véritable “plan Marshall” pour appuyer la consolidation démocratique et favoriser le développement économique». Ceux là sont un bien pour nous. Espérons qu’ils soient entendus par les décideurs.

Les Tunisiens sont désappointés car ils considèrent que la réussite tunisienne est stratégique pour l’Europe qui a fait de la conditionnalité démocratique le fondement de son accord d’association avec la Tunisie en 1995 comme avec tous les autres pays. Les Tunisiens savent que l’UE n’a jamais réussi à faire respecter par le pouvoir déchu cette conditionnalité démocratique et a même laissé faire. Le peuple tunisien a fait seul sa démocratie et l’a chèrement payé par pas moins de 320 martyrs et des milliers de blessés. Il a débarrassé l’UE de cette contrainte et lui a offert une référence.

Les Tunisiens sont inquiets du terrorisme qui a frappé notre pays de plein fouet et qui le menace encore mais auquel ils résistent et ont réussi à le contenir. Notre société regarde avec effroi  tout ce qui se passe comme désastre dans les pays arabes et toute cette terreur qui s’est abattue sur nous qui est conséquente  à une option stratégique atlantiste. Cela a commencé  par le lancement du projet: «nouveau moyen orient» qui a été amorcé en Afghanistan poursuivi en Irak et étendu plus tard à  la Libye, la Syrie et le Yémen tressant le berceau d’un nébuleux Etat Islamique rampant et progressant ne connaissant plus de frontières avec tout le désastre que nous connaissons dans nos pays et même en Europe. Sommes-nous responsables de ce désastre terroriste qui s’abat sur nous et aujourd’hui sur tout le monde? Une guerre asymétrique nous a été ainsi imposée de l’intérieur, l’adversaire étant invisible et inattendu face à un laisser faire extérieur troublant. Nous avons réussi à le contenir par nos propres forces. Rassurez vous, vous ne sentirez jamais de l’angoisse au contact de la société tunisienne. En Tunisie il fait toujours bon d’y vivre. Le peuple tunisien est assez optimiste toujours hospitalier. Il est aussi réaliste et ne peut se passer des autres et particulièrement de nos amis traditionnels et nos voisins comme  l’Italie.

Ce n’est donc pas par hasard que la Tunisie ait bénéficié d’un Jardin des Justes, «comme tant d’autres érigés en Italie et dans le monde, qui promeuvent la «mémoire du Bien  pour rappeler ceux qui, au moment où les crimes étaient commis ont mis leurs vies en danger pour les contrer. Dans ce cadre, la Tunisie a été considérée  comme lieu particulièrement symbolique et Pays crucial dans le cœur de la Méditerranée». Le 15 Juillet, à l’ambassade d’Italie à Tunis, S.E. l’Ambassadeur Raimondo De Cardona, le Prix Nobel M. Abdessattar Ben Moussa et le Président de Gariwo M. Gabriele Nissim ont dédié les premiers arbres du jardin à quatre Justes arabes et musulmans qui ont risqué leurs vies pour lutter contre la persécution et le terrorisme et pour la protection des droits de l’homme1. «Parmi eux Mohamed Naceur Ben Abdesslem, guide touristique. Le 18 mars 2015, il est au Bardo avec un groupe d’italiens, quand des hommes armés entrent dans le musée et commencent à faire feu. Grâce à sa connaissance des salles du Musée et courageusement, il conduit les touristes à l’abri. Deux minutes après les terroristes, entrés dans la salle de Virgile, tuaient neuf personnes»2

Cet exemple me suffit pour montrer la pertinence du choix de ce thème «Vous êtes un bien pour moi». Mais je continue tout de même à croire en la haute pertinence de notre dicton «seul ton cil te pleurera et seul ton ongle te grattera». Passons aux questions maintenant.

Vous  avez participé aux différentes phases de l’activité constituante. Qu’est-ce que vous pouvez nous dire de votre expérience, quelles ont été les difficultés, les points de tension, parmi les forces politiques?

Pour schématiser les forces politiques étaient divisées en deux camps: La force islamiste  conservatrice, ses associés et alliés  au pouvoir face aux forces démocratiques, progressistes  et modernistes dans l’opposition. Nous avons vécu un confit réel aussi bien dans le parlement que dans «la rue».

Les points de tension et les contradictions qui ont émaillé l’élaboration de la Constitution peuvent être résumés comme suit: Tradition et modernité, Etat civil et Etat religieux, laïcité et islam, citoyenneté et croyance, volonté du peuple et volonté de Dieu, droit positif et Sharia, droit national et droit international, universalité et spécificité, hommes et femmes. En un mot la Constitution a-t-elle pour sujets ou destinataires des citoyens ou des croyants?

La société civile moderniste et démocratique derrière ses élus  a pesé d'un grand poids et a aidé par sa mobilisation à la consécration de l'Etat civil, des libertés et des droits universels, un pouvoir politique équilibré, des contre pouvoirs efficaces, une justice indépendante avec une Cour Constitutionnelle et un pouvoir local affirmé et prometteur.

La nouvelle Constitution tunisienne s’est distinguée par la solution d’une question très délicate et problématique soulevée à la suite d'une révolution civile et démocratique, suivie par l'accès d’un mouvement politique islamiste au pouvoir. L'Assemblée Nationale Constituante a réussi à surmonter les contradictions et d'approuver massivement la nouvelle constitution le 27 Janvier 2014 par 200 voix sur 217. Cela met en évidence que si la différence est miséricordieuse, le consensus sur un minimum de valeurs humaines communes l’est encore plus.

La Constitution tunisienne est la seule Constitution dans les pays arabes et musulmans qui n’ait pas mentionné la Sharia comme source du droit. Elle a aussi mentionné que «L’État protège la religion, garantit la liberté de croyance, de conscience et de l’exercice des cultes. Il assure la neutralité des mosquées et des lieux de culte de l’exploitation partisane. L’État s’engage à diffuser les valeurs de modération et de tolérance...et à prohiber et empêcher les accusations d’apostasie, ainsi que l’incitation à la haine et à la violence et à les juguler ». Elle a consacré  l'identité arabe et musulmane, mais aussi l'ouverture sur les autres cultures et langues. Elle a instauré la parité entre les hommes et les femmes. Elle a constitutionnalisé l’attachement de la Tunisie à l’universalité de la  civilisation humaine et à la diversité culturelle, à un Etat civil pour une société arabe et musulmane. Ainsi la Constitution est résumée dans son article 2: «La Tunisie est  un  Etat civil fondé sur la citoyenneté, la volonté du peuple et la primauté du droit» après avoir maintenu l’article 1er de la constitution de 1959 «La Tunisie est une Etat libre indépendant et souverain, sa religion est l’islam, sa langue est l’arabe son régime est la République» Ces deux articles ne sont pas révisables.

L'acceptation des modernistes et des islamistes de la coexistence sous le parapluie de cette Constitution les fédérera dans la lutte contre le radicalisme islamiste qui a choisi d’être hors la Constitution.

Le rôle des la société civile a été déterminant d’un grand appoint. En effet c’est la société civile démocratique qui a soutenu les 40 constituants qui se sont retirés de l’ANC suite à l’assassinat du constituant  Mohamed Brahmi six mois après l’assassinat d’un leader de l’opposition Chokri Belaid. Un million deux cent milles personnes se sont mobilisés du 25 juillet au 7 octobre dans l’historique sit in de la place du Bardo face à l’ANC.

Le Quartet émergera alors comme le représentant de la société civile et jouera un rôle déterminant pour débloquer la situation. La majorité au pouvoir a fini par céder. Une feuille de route a été élaborée sous le parrainage du Quartet. Elle fixe un calendrier pour achever la période transitoire par une modification du projet de Constitution du 1er juin un changement du gouvernement et son remplacement par un gouvernement neutre et de compétence pour la période qui reste dont le chef a été élu par les 21 partis composant le dialogue national.

On a vu le rôle joué par la société civile tunisienne dans le processus constituant  qui n’a pas de pareil. Pouvez vous nous dire quelque chose de plus sur cette «unicité tunisienne», sur son origine, sur ses racines dans l’histoire, la tradition du pays ? Pouvez-vous nous aider à connaitre mieux la Tunisie?

En peu de mots la Tunisie est un pays de trois mille ans d’histoire qui a eu l’une des plus anciennes constitutions du monde, la Constitution  de  Carthage, la plus ancienne Constitution du monde arabe qui date de 1861. C’est une société qui a été homogénéisée par son appartenance arabe et son adoption de l’islam sunnite et du rite malékite  fondés sur la modération et la tolérance. C’est une société qui n’est pas fragmentée c’est ainsi que contrairement aux autres pays du Maghreb il n’y a pas une minorité berbère ou amazigh significative mais son droit à la diversité culturelle doit être reconnu et respecté. L’Etat national issu de l’indépendance a unifié la société et laminé les divisions par l’éducation, l’émancipation de la femme et le développement économique et social.

Les Tunisiens sont pacifistes, hospitaliers, patients mais ils peuvent se révolter et paraître même très violents et belliqueux comme l’atteste la notoriété qui a été donnée à ces jeunes tunisiens qui ont rejoint l’EI. Je dois dire qu’ils ne représentent pas le peuple tunisien. Les forces de l’ordre, de l’armée nationale et des citoyens désarmés ont réussi à éliminer à Ben Guerdane en Mars 2016 une quarantaine d’assaillants armés venus de Lybie qui  ont tenté sans succès l’instauration un émirat islamique. Le radicalisme de ces jeunes s’explique  par la marginalisation économique et sociale mais aussi l’incursion de mouvements radicaux à la faveur du retour des islamistes après la révolution et de leur accès au pouvoir d’une part et l’instauration d’un Etat Islamique par une volonté qui nous est extérieure d’autre part. L’absence d’horizons a beaucoup favorisé ce radicalisme  aventurier des jeunes. C’est pourquoi une stratégie de renforcement du codéveloppement dans les régions défavorisées sera bénéfique aussi bien pour la Tunisie que pour l’Europe. L’essentiel reste entre les mains des grandes puissances et leurs alliés qui ont laissé naître cet EI s’ils ne veulent pas que la guerre s’installe chez eux ce que nous déplorons du reste car l’ennemi est commun. Toutefois nous ne pouvons en supporter la responsabilité et nous le payons déjà assez cher comme cela.

Le futur de cette expérience exceptionnelle: maintenant la Constitution est en vigueur, mais dans un contexte social, économique, politique, sécuritaire (national et régional) très difficile, dont on reçoit des échos en Europe et en Italie aussi. Il est toujours frappant d’écouter le nombre de jeunes tunisiens qui ont rejoint l’EI, comme combattants, ou de voir de nombreux jeunes d’origine tunisienne soupçonnés de terrorisme dans pas mal de pays.  Qu’est ce qui se  passe en Tunisie aujourd’hui? Celle-ci est la grande question qu’on se pose en Europe.

Parlons du présent et du futur. Quels sont les principaux défis aujourd’hui? Ils sont résumés dans le «Pacte de Carthage» signé le 13 juillet 2016 par neuf partis politiques et les trois plus grandes organisations nationales et dont l’initiative revient au président de la République. Il fixe notamment «le programme et les priorités qui guideront le travail du futur gouvernement d’union nationale, surtout dans les domaines de la lutte contre le terrorisme, l’accélération du rythme de la croissance de l’économie, de la création d'emplois et de la lutte contre la corruption. Le document met également en place les jalons pour une bonne gouvernance et un contrôle de l'équilibre des finances publiques. L’accord vise aussi la mise en œuvre d’une politique sociale efficace et l’adoption d’une politique spécifique en faveur des villes et des collectivités locales».

Ce gouvernement d’union nationale tend à assurer une  stabilisation politique appuyée par une majorité plus confortable encore à l’assemblée. La Tunisie a connu 9 gouvernements depuis la révolution soit en moins de 6 ans. Mais on peut se demander comment l’Italie qui a connu en 70 ans de république 62 gouvernements est aujourd’hui l’une des plus grandes puissances économiques au monde et qu’elle fait partie du G8 ? Il faut donc relativiser cette idée car l’expérience montre que la qualité des acteurs politiques est plus importante que la nature du régime. Un gouvernement stable entre de mauvaises mains peut conduire à la catastrophe notre révolution l’a attesté. Un gouvernement instable mais entre de bonnes mains peut faire avancer le pays. L’idéal serait de les avoir les deux.

Le pacte vise aussi «l’adoption d’une politique spécifique en faveur des villes et des collectivités locales». Le prochain important défi politique est l’organisation des élections régionales et locales qui sont programmées pour mars 2017. A cet effet un projet de code des collectivités locales a été finalisé le 27 juin 2016. La loi électorale est en cours de discussion à l’assemblée. Il s’agit là d’une seconde épreuve capitale qui servira à mettre en place le pouvoir local prévu au chapitre VII de la Constitution après la mise en place du pouvoir central législatif et exécutif conformément  aux chapitres III. Et IV de la Constitution.

Oui la Société Civile aura un rôle à jouer. La démocratie participative lui ouvre la voie.  Elle a été expressément constitutionnalisée particulièrement dans le chapitre VII sur le pouvoir local. Le projet de code des collectivités locales prévoit cette participation. Les jeunes et les femmes sont cités comme acteurs principaux et leur représentation significative aux nouveaux conseils locaux et régionaux est assurée.

Quant au rôle à jouer par le quartet mais d’autres organisations de la société civile aussi il est toujours nécessaire. Il est vrai que l’ordre des avocats et la ligue tunisienne des droits de l’homme  sont dans une situation plus confortable que celle d’avant la révolution  car la  démocratie  est désormais bien ancrée en Tunisie. Mais ils sont appelés à demeurer vigilants et à l’avant garde de la société civile, légitimés encore plus par le prix Nobel. Ils sont appelés à être encore et  toujours des gardiens essentiels des droits humain car la démocratie est un défi permanent et j’aime répéter qu’elle est  «comme la ménagère sa journée n’est jamais terminée». Les connaissant bien je sais qu’ils n’y manqueront pas avec tant d’autres associations militantes. Mon collègue et ami le bâtonnier  Fadhel Mahfoudh prix Nobel de la paix vous en parlera.

Quant aux autres organisations nationales: l’UGTT, l’UTICA et l’UNAT elles sont devenues des acteurs principaux. Face aux problèmes économiques et sociaux que connait le pays le gouvernement ne peut assurer la stabilité sociale et la reprise économique sans le concours de ces organisations. Le dialogue économique et social  est devenu incontournable. La participation de ces organisations à la gestion du pays est aussi importante que celle des partis politiques si ce n’est plus. C’est sur cette base  que  certaines organisations tiennent à un encadrement juridique de ce dialogue social.

A cette fin et faute de l’avoir obtenu dans la constitution, la centrale syndicale avec le concours des deux autres ont réussi à l’insérer dans le Pacte de Carthage. Ainsi mention a été faite  de l’ «institutionnalisation du Dialogue social en vue de réaliser les conditions de la stabilité sociale» ajoutant «la nécessité d’accélérer l’adoption de la loi sur le conseil national du dialogue social, l’activation des travaux de ses commissions et le respect de ses indications et en particulier la mise en place d’un système d’assurance pour la perte d’emplois».

En revanche il convient de noter que persistent encore, aussi bien sur le plan économique et social que sur le plan politique et éthique, des points de discorde qui n’ont pas été réglés par ce Pacte. Il en est ainsi de l’engagement pour une trêve sociale qui se traduirait par une suspension du droit de grève pour les deux années à venir. La centrale syndicale préférant d’abord le règlement des problèmes sociaux en cours. Il en est de même pour le projet de loi sur «la réconciliation économique et financière» initié par le président de la république. Il n’a pas été non plus validé car considéré comme une amnistie injuste et tendant à contourner la justice transitionnelle inscrite dans la Constitution qui prévoit les mécanismes appropriés.

C’est donc un pacte à minima bon à prendre mais les risques et les obstacles demeurent. Certes la Tunisie est encore en  état d’urgence mais elle n’est pas en état d’exception. Ni guerre ni paix mais batailles et trêves ponctuées de compromis. Ainsi va la vie, ainsi va la Tunisie.

Vous pouvez être sûrs qu’elle est sur la bonne voie car elle a réussi la plus difficile des épreuves : devenir en cinq ans un vrai pays démocratique. Le printemps tunisien est toujours là.  Mais si j’exprime toujours mon attachement à notre dicton «seul ton cil te pleurera et seul ton ongle te grattera» je dois concéder la bienvenue de son corollaire «tu es un bien pour moi». Par leur combinaison la Tunisie confirmera qu’elle n’est pas une simple population ou une simple société mais une vraie et grande nation. Un havre de paix dans une région turbulente.

                                                                                                                                

 1-Khaled Al-Asaad, archéologue syrien de renommée mondiale, né en 1934 à Tadmur, l’ancienne Palmyre, à laquelle il dédiera sa vie. Depuis 1963, il a été le directeur du site archéologique de la ville, qu’il décide de ne pas laisser malgré les menaces des terroristes de Daesh. Le 18 août 2015, il est brutalement tué par les miliciens pour avoir refusé de révéler où avaient étés cachés les trésors de Palmyre. Mohamed Bouazizi, vendeur ambulant tunisien, Humilié et exaspéré par l’énième injustice, le jeune homme s’immole devant le bureau du gouverneur en signe de protestation. Son geste, marque le déclenchement de la Révolution des Jasmins et des printemps du monde arabe. Khaled Abdul Wahab, entrepreneur de Tunis, fils d’un éminent historien, sert d’intermédiaire pendant l’occupation nazie de 1942 entre la population locale et les occupants. Ayant appris les plans des nazis, Abdul Wahab cachera Jakob Boukris – un éminent producteur d’appareils électriques -, sa famille et d’autres juifs dans le moulin à huile de sa ferme, en les protégeant jusqu’au départ des ennemis.

2-Extraits du texte de présentation faite par les organisateurs.

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