Sfax, la deuxième ville du pays, à l’ère de la Révolution: à quand la fin de «l’embargo aérien»?
L’aéroport de Sfax fut dès sa création conçu de «la plus petite dimension», de tout temps sous équipé, mal subventionné, poussé à l’inactivité, sciemment condamné à rester insignifiant. Cela s’inscrivait dans le cadre de "l’embargo généralisé" que la dictature régionaliste infligeait à la ville de Sfax et ce fut strictement appliqué par l’intermédiaire des institutions étatiques concernées, la Compagnie Tunis Air et son Ministère de tutelle en l’occurrence.
En confirmation de l’opposition ferme de l’Administration au développement du trafic aérien à Sfax, Alitalia ne fut jamais autorisée à y ouvrir (malgré la demande) une ligne directe; de son coté Air-France a fini par y fermer ses vols (déjà réduits) depuis Paris en raison du sous-équipement technique de l’aéroport et de l’insécurité de sa piste d’atterrissage.
C’est dans ce contexte de refus obstiné de Tunis Air à desservir convenablement cet aéroport que la naissante Compagnie Syphax Air-Lines avait prétendu "pallier à la déficience" et assurer à elle seule une ligne (l’unique) reliant Sfax à l’Europe (via Paris).
Syphax-AL en grande difficulté (c’est son affaire) et obligée de suspendre ses vols en Juillet, l’aéroport de Sfax s’est retrouvé pratiquement fermé ; cet isolement aérien illimité de la ville pénalise lourdement les voyageurs ainsi que l’économie de la région et donc de tout le pays.
Face à l’isolement brusque qui affecte la deuxième ville du pays le Ministère des Transports et l’étatique Tunis Air affichent «indifférence et dédain», comme s’ils n’étaient pas concernés par le problème ni tenus de lui trouver une solution urgente, fut-elle partielle ou transitoire.
Plus triste encore, face à autant d’incurie et/ou de mépris de la part de ces autorités, les citoyens tout comme les responsables et les élus de la région tardent à réagir et s’indigner. Certains vont jusqu’à fermer les yeux sur ces manquements, obsédés par le désir de culpabiliser M Frikha (fondateur-propriétaire de Syphax-AL) pour stigmatiser son engagement politique(?); il est permis de contester «les choix» de ce Monsieur et de palabrer sur leur part de responsabilité dans l’enlisement financier de sa Compagnie ou dans «l’isolement aérien» que vit Sfax aujourd’hui; mais il serait indécent de masquer (justifier) par une telle diversion l’indifférence dont fut coupable l’Autorité Centrale face à un tel isolement, une indifférence qui confirme d’ailleurs son obstination à «condamner l’aéroport de Sfax à la mort lente».
La dictature déchue est en principe aujourd’hui écartée mais ses fonctionnaires sont toujours là, agissants et décisifs; ainsi, sur les mêmes sujets brûlants sciemment laissés en suspens, la même administration avec les mêmes cadres omnipotents continue de réagir et sévir avec les mêmes préjugés et le même zèle arbitraire; et on retrouve cette même démarche aux plus hauts grades de la hiérarchie politique, avec encore plus d’autorité, d’abus et de dégâts.
Hélas, face aux dérives autoritaires résurgentes, un "trop grand nombre de citoyens" continue d’encourager inconsciemment le retour aux abus, en persistant soit à leur trouver des excuses soit à se montrer déçu et désabusé ou passif et résigné.
A Sfax, comme en d’autres régions qui eurent à subir l’injustice de la dictature qui leur fut hostile et préjudiciable, le citoyen aujourd’hui libéré par la grâce de la Révolution doit savoir réclamer ses droits avec courage et dignité; sans quoi, rien ne changera jamais.
Dr Mohamed Aloulou
Sfax, Décembre 2015