Le Ramadan, les vacances et les élections: Qui s'occupera de l'essentiel?
Deux coups d’envoi, simultanément, en ce début de juillet. Celui du mois saint du Ramadan qui coïncide cette année avec le démarrage de la saison estivale, juillet-août. Et celui de la période préélectorale, fixée par le nouveau code électoral à trois mois avant les scrutins, prévus à partir du 26 octobre prochain. La Tunisie changera alors de rythme.
Relâchement dans le travail, surconsommation, veillées prolongées, fêtes familiales et départs en vacances: pendant deux mois, les Tunisiens vivront sur un autre registre. Leur attention sera monopolisée par la chaleur, les moustiques, les ordures, la cherté des prix ou l’arnaque dans les établissements qu’ils fréquentent… Ils n’en seront pas moins heureux de savourer l’ambiance particulière du Ramadan et le farniente des vacances. C’est sacré ! Ne leur parlez surtout pas de productivité : tout ou presque est au grand ralenti. Attendez la rentrée.
Quant à la classe politique, point de répit : c’est la surchauffe à l’approche des élections. Au sein des grands partis, la guerre des investitures pour figurer en bonne place sur les listes des législatives battra son plein. Les petits partis peineront à boucler les leurs. Mais, il y a surtout, pour tous, le jeu des alliances qui vont se faire et se défaire jusqu’au bout, en quête du gouverner ensemble. Double enjeu : conquérir aux législatives le plus de sièges possible à l’Assemblée des représentants du peuple et remporter à la présidentielle la magistrature suprême. Peu se soucient à présent de l’état où ils retrouveront les vrais indicateurs du pays au lendemain des scrutins. Deux courses effrénées, avec des ego surdimensionnés et des ambitions démesurées qui tiendront la Tunisie en haleine, dès ce mois de juillet, jusqu’au 28 décembre prochain, date butoir du second tour de la présidentielle. Toutes les options sont ouvertes, avec toutes les surprises possibles.
Pendant ce temps, le gouvernement n’a guère droit au moindre repos. Tous les risques de tensions sociales, de fragilisation de l’équilibre précaire du pays, de blocage du processus des élections et d’attaques terroristes demeurent menaçants. Certes, dans ce tumultueux contexte géopolitique arabe lourdement marqué par ce qui se passe en Libye, en Syrie, en Irak et dans d’autres pays de la région qui risquent de devenir un nouvel Afghanistan, la Tunisie, relativement épargnée, offre les meilleures garanties de réussite dans la transition démocratique. Les balises de stabilisation sont amarrées, les fixations du socle fondateur de l’Etat commencent petit à petit à se consolider et l’espoir de relance économique est sans cesse encore plus vif. Chacun et tous attendent les élections qui mettront fin au provisoire qui n’a que trop duré, pour remettre le pays sur l’essentiel : la stabilité, la sécurité et la croissance économique. Le politique, quasiment réglé, il va falloir s’attaquer à l’économique et au social.
Le gouvernement prépare déjà le terrain. Mais, il aura d’ici là à prendre de douloureuses décisions. Le dialogue économique permettra, dans les tout prochains jours de ce début de juillet, après plus d’une trentaine de réunions en groupes de travail, de valider des orientations, sans imposer des mesures que seul le gouvernement est en droit de fixer. La loi de finances complémentaire suivra immédiatement et sera soumise à l’Assemblée nationale constituante. On ne peut pas faire l’économie d’une mesure par rapport aux autres. Tout doit aller ensemble, quitte à se faire violence et consentir de grands sacrifices. Pour que ça marche après, il faut que ça commence à marcher maintenant. Et si on veut convaincre les donateurs et investisseurs étrangers qui seront invités à la grande conférence de septembre prochain, on doit leur montrer notre engagement sérieux sur la voie de la stabilisation générale, des réformes structurelles et de la reprise du travail avec ardeur et détermination. Nous n’aurons pas une autre occasion pour le faire dans l’immédiat. Le gouvernement actuel terminera sans doute son mandat par l’élaboration du budget de l’Etat pour l’année 2015. Mais, il ne sait pas encore qui va l’examiner et le valider. Fin décembre 2014, l’actuelle ANC sera sortante, la nouvelle Chambre des représentants du peuple sera-t-elle alors en place ?
Rien pour autant ne perturbera les Tunisiens durant au moins ces deux mois, ni ne les privera de leurs réjouissances. Ramadan Mabrouk et bonnes vacances.
T.H.
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