News - 19.02.2021

Tunisie: Aux docteurs futurs candidats au concours de recrutement de maîtres-assistants

Aux docteurs futurs candidats au concours de recrutement de maîtres-assistants

Par Najoua Essoukri Ben Amara - Le chef du gouvernement Hichem Mechichi a annoncé le 11 Février 2021 le recrutement, sur 3 années, de 2400 docteurs chômeurs à partir de l'année 2021. Cela aura lieu naturellement à travers le concours de recrutement et de promotion des maîtres-assistants, la seule voie possible d’accès à l’enseignement supérieur.

Ce recrutement est certes une réponse à une demande pressante des docteurs chômeurs mais également à un grand besoin de plusieurs établissements d’enseignement supérieur, dans certaines spécialités en particulier.

Les futurs candidats devraient dès à présent « se rebrousser les manches », si ce n’est pas toujours fait, pour bien se préparer au concours, plusieurs d’entre eux ont déjà vécu l’expérience dans les sessions antérieures de recrutement. Même si le nombre de postes qui sera ouvert semble être élevé, la concurrence est très rude, les dossiers fort heureusement, sont de plus en plus de très bonne qualité dont certains sont très proches.

C’est bien au niveau du nombre de postes externes de maîtres-assistants qu’il y a la plus forte demande. D’après les données de la DGES (réunion du 30 janvier 2020 à la Cité des Sciences à Tunis), en la session 2018 (ayant eu lieu en 2020), 2853 candidats ont postulé pour 1064 postes de maîtres-assistants toute discipline confondue (dont 867 sont des postes internes de promotion) ; le nombre de postes externes étant de 197 pour 2061 candidats. Ce fossé entre nombre de postes ouverts et nombre de candidats ne cesse de se creuser et rend de suite la sélection des candidats très ardue et sujet à controverse.

Pour information, les commissions de recrutement et de promotion au grade de maître-assistant sont composées chacune de 5 membres, dont trois ayant le grade de professeurs ou maître de conférences, sont élus par l’ensemble des professeurs et maîtres de conférences de la discipline concernée et deux membres, professeurs ou maître de conférences, sont désignés par le ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique. Ces commissions consultatives, sont amenées à retourner au ministère la liste classée des candidats et de proposer ceux retenus.

Un travail colossal et surtout à très forte responsabilité est alors à la charge des commissions, particulièrement au niveau de l’élaboration de la grille d’évaluation. Cette grille devrait permettre de faire ressortir les meilleurs candidats futurs enseignants chercheurs, ayant à la fois un bon parcours universitaire, des aptitudes pédagogiques qui assureraient la bonne communication / le transfert des connaissances vers les apprenants ainsi que les qualités d’un bon chercheur scientifique qui répondrait au mieux à la spécialité requise par les établissements. Plusieurs réunions sont organisées pour convenir de la grille finale d’évaluation et de la notation de chacun des critères et ceci bien avant le commencement des séances de discussion.

Rappelons que les critères globaux de la grille d’évaluation, sont fournis par le ministère aux présidents des commissions pour les peaufiner avec leurs collègues membres du jury. Pour la session 2018 et pour une meilleure transparence, chaque commission a été appelée à retourner la grille finale d’évaluation (avec le barème de notation) visée par les différents membres, au plus tard le 15 février 2020, condition obligatoire pour la réception des dossiers des candidats. 

Il est à noter que le barème de notation est plafonné par rubrique (cursus universitaire, activités de recherche, activités pédagogiques…), ce qui devrait permettre de sélectionner les candidats qui présentent le meilleur équilibre entre les différentes compétences/connaissances requises d’un futur enseignant dans la spécialité demandée.

Une fois les dossiers des candidats reçus, les membres du jury les étudient bien avant les séances de discussion en prenant note des éléments essentiels fournis par le candidat en rapport avec les critères de la grille d’évaluation. Pour des raisons d’éthique, aucun membre du jury n’est autorisé à évaluer des dossiers des candidats qui sont parmi ses chercheurs ou parmi les membres de sa structure de recherche.

L’étude d’un dossier peut prendre plusieurs jours selon le nombre de documents fournis.

Lorsque les dates des auditions sont fixées, le président de la commission lance les convocations par lettre recommandée à tous les candidats tout en joignant au courrier la grille d’évaluation, et ceci obligatoirement au moins 15 jours avant la date de la séance d’entretien selon les textes en vigueur.

Les critères globaux de la grille sont généralement au nombre de six:

Le cursus du candidat : essentiellement ses diplômes/mentions à partir du baccalauréat, le nombre d’années d’études par diplôme, l’adéquation des disciplines des diplômes obtenus avec la spécialité des postes ouverts. Un redoublement et/ou une année supplémentaire pour l’obtention d’un diplôme donné, entraine une sanction au niveau de la note attribuée au candidat conformément au barème fixé dans la grille d’évaluation.

Les productions scientifiques : Outre le nombre des productions, la qualité de la revue de publication est primordiale. Les publications dans des revues avec facteur d’impact sont mieux notées que celles publiées dans des revues indexées. Pour un jugement plus objectif, l’indicateur quartile (Qi) est de plus en plus utilisé surtout qu’il permet de situer la notoriété des revues d’un même domaine ou de domaines différents. Ainsi le quartile retenu de la revue où a été publiée la production scientifique du candidat, sera celui du domaine le plus proche de la spécialité de la commission de recrutement. Pareillement, la notation des publications dans des conférences, dans la spécialité, diffère selon que la conférence est classée ou pas, indexée, avec/sans comité de lecture.

A ce niveau, les publications qui présentent un taux de plagiat (ou auto-plagiat) supérieur à un seuil fixé par la commission, ne sont pas comptabilisées et peuvent conduire à l’exclusion du candidat du concours. Le problème du plagiat, souvent non jugé à sa juste valeur par les candidats, est parmi les causes de pénalisation de certains d’entre eux.
Les instances et la tutelle sont averties de ce problème et œuvrent pour mettre à la disposition des enseignants des outils efficaces anti-plagiat, afin d’éviter d’avoir des productions, en nombre important cependant entachées de plagiat, ce qui porte atteinte non seulement aux travaux publiés mais également à l’image des structures de recherche, aux établissements d’attache ainsi qu’à nos universités. Il est important de savoir choisir le bon logiciel de vérification, certains ne permettent pas de détecter convenablement le plagiat, s’il existe. C’est pourquoi, certaines commissions de recrutement limitent le nombre de productions scientifiques comptabilisées par année, un message implicite pour éviter aux candidats de chercher à avoir un nombre élevé de productions et d’avoir recours à publier pratiquement les mêmes travaux plus d’une fois ou tomber dans le copier/coller de travaux d’autrui.

Il est à signaler que seules les activités et les productions scientifiques soumises dans le dossier avant la clôture du dépôt des candidatures, sont comptabilisées. Toutefois, les productions scientifiques signalées dans le dossier soumis et acceptées par la suite, sont également prises en compte dans la grille d’évaluation.

L’expérience pédagogique est un critère important sur lequel sont évalués les candidats. Des contrats sont souvent joints aux dossiers de ceux qui postulent, témoignant du volume horaire des enseignements assurés. Il existe essentiellement deux types de contrat : contrat docteur et contrat doctorant qui peuvent être étalés sur un semestre ou sur toute une année. Il existe des contrats annuels de 9h, d’autres de 14h et de 15h par semaine. Des contrats/attestations de vacations sont également pris en compte. La règle générale est de comptabiliser le volume horaire total effectivement assuré et non pas le nombre de contrats. Les attestations d’encadrements de projets (SFE, PFE, PFA..) ainsi que ceux des co-encadrements de mastère/thèses devraient être visés par l’administration de l’établissement concerné et non pas par le directeur de la thèse du candidat. Quant aux supports pédagogiques fournis dans les dossiers, ils doivent être visés pour qu’ils soient examinés.

L’implication du candidat dans des projets de recherche et/ou à caractère socio-économique, dans des activités d’organisation de manifestations scientifiques, est appréciée tout comme les expériences dans l’industrie.

La séance de discussion, publique d’après les textes en vigueur, est une occasion pour le candidat pour démontrer ses compétences pédagogiques à travers la présentation orale de son dossier. La qualité du support de la présentation, le respect du temps alloué ainsi que la réponse aux différentes questions des membres du jury, celles en rapport avec la spécialité en particulier, sont parmi les critères d’appréciation du candidat pendant la séance de discussion. Comme règle générale adoptée par les commissions, si l’un des candidats est chercheur ou membre chercheur de la structure de recherche de l’un des membres du jury, ce dernier ne participe pas à la notation de la séance d’entretien.

Une fois les séances de discussion achevées et lors des délibérations finales, qui peuvent s’étaler sur plusieurs jours, le jury tient compte, pour l’admission des candidats, de tous les critères définis dans la grille d’évaluation.
A la date de la rédaction de cet article, pratiquement tous les résultats des différentes commissions de recrutement et de promotion sont proclamés, il est très important que notre ministère procède à une évaluation « à froid » des travaux des différentes commissions. Une réunion avec les présidents des commissions s’impose afin de discuter du déroulement des entretiens, des éventuels problèmes ayant eu lieu, du niveau des candidats, de la qualité des dossiers, de la grille d’évaluation, des recommandations soumises par certaines commissions… la prise de mesures, si nécessaire, pour les prochaines sessions devant être planifiée bien à l’avance.

Nous espérons à travers la présentation en particulier de la grille d’évaluation, avoir donné quelques  éléments qui pourront aider nos futurs collègues à bien se préparer pour la prochaine session du concours de recrutement, leur dossier à soumettre dans quelques mois étant la première priorité.

Nous espérons également avoir montré un tant soit peu la charge à la fois physique et morale, qui incombe aux différents membres d’une commission de recrutement tout en laissant à deviner le rôle que devrait jouer son président pour assurer les bonnes conditions de déroulement du concours en veillant avec ses collègues, au respect total de la grille d’évaluation.

Certes le « système » de déroulement des concours de recrutement est perfectible, son évaluation est indispensable même si les erreurs d’appréciation sont vraiment minimes. Avec toutes les mesures prises pour la définition de la grille d’évaluation en particulier, il est inconcevable de penser qu’un candidat ayant un dossier qui se distingue par rapport aux autres ne soit pas retenu.

Si nous pouvons pardonner à certains candidats leurs diffamations, nous ne pouvons accepter les accusations gratuites de personnes averties, en se référant uniquement au point de vue d’un(e) candidat(e), un antécédent qui pourrait faire écrouler le système de recrutement. Les membres du jury devraient bénéficier d’immunité contre toute diffamation et injures. S’il y a vraiment erreur c’est la justice qui devrait s’en charger.

Najoua Essoukri Ben Amara
Professeur à l'Ecole Nationale d'Ingénieurs de Sousse
Chef du laboratoire de recherche LATIS


 

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