News - 22.07.2020

Mohamed Jegham: un messsage d'outre-tombe au Président Bourguiba

Mohamed Jegham: messsage d'outre-tombe  au Président Bourguiba

Monsieur le président

Qui sait ? Peut-être que les anges seraient très aimables pour vous faire parvenir ma missive, au paradis ; J’en serais très honoré. Incontestablement, depuis votre départ, nous avons été constamment à la recherche de l’homme qui pourrait continuer votre œuvre. En vain. 

Avec vos compagnons, vous avez libéré notre pays. C’était un rêve. Vous l’avez réalisé. Et puis, inlassablement, vous avez construit un état. Ex nihilo. Le résultat était spectaculaire,  avec le respect total de toute la communauté internationale. L’espoir, la confiance, la fierté et l’ambition étaient dans tous les esprits, dans tous les cœurs.

Monsieur le président

Le 9 Avril 1956, un lundi, au Bardo, vous avez été élu comme premier président de l’assemblée constituante, vous avez occupé le perchoir, dignement, avec la fierté de tout un peuple.

Pour ne pas trop gâcher votre séjour au paradis, je tais le nom de celui qui occupe aujourd’hui cette chaire dans cette prestigieuse institution.

Monsieur le président

Avec beaucoup d’amertume, je vous fais savoir que la Tunisie va mal. Très mal.

Que s’est-il passé pendant toute cette période ? Pourquoi on est descendu si bas?

Commençons par quelques fondamentaux qui constituent l'ossature de votre vision:  

Vous avez honoré la femme. Aucun autre chef d’état dans aucun pays ne s’est occupé d’elle comme vous l’avez fait. Qui ne se rappelle pas de ce geste paternel par lequel vous avez ôté le «Sefsari» de la tête d’une femme qui était par hasard, devant vous, dans la foule?  vous lui avez tapoté sur la joue, en signe d’affection.

C’était un geste divin, le premier pas de la libération de la femme tunisienne un jalon vers la modernité.

Aujourd’hui cette femme porte le hijab. Celles qui le portent sont légion; elles sont plus de quatre millions. D’aucuns invoquent la liberté...  Je réponds: quel gâchis pour notre pays.

Dans un autre registre, on est en droit de se demander où en est l’école que vous avez édifiée, vénérée. Pourquoi le niveau a dégringolé si bas ? C’est aberrant.

Comment en est-on arrivés  là ?

Rappelons-nous que vous avez fait construire des écoles et des lycées partout. Aucune différence entre les régions.  Le savoir,  la culture, l’éducation sont une religion pour vous. Le résultat ne s’est pas fait attendre. Des centaines de milliers de jeunes sont sortis de ces établissements pour occuper les meilleurs postes d’ingénieurs, avocats, juges, professeurs, médecins en Tunisie et dans le monde, alors que beaucoup d'entre eux étaient issus de familles pauvres. L’ascenseur social a bien fonctionné. C’était un défi, encore un pari que vous avez gagné.

De nos jours, paradoxalement, nous sommes classés, semble-t-il, le premier pays pourvoyeur de terroristes dans le monde. la Tunisie, la Syrie, la Lybie et des pays européens ont été  victimes de ces jeunes, endoctrinés, nourris d’obscurantisme et d’ignorance.

Que s’est il passé dans l’école de Bourguiba?

Monsieur le président

Pourriez-vous de là où vous êtes, au paradis, Insuffler à notre pays la volonté, la détermination, le courage et la clairvoyance qui sont les vôtres, pour que nous puissions enfin retrouver le chemin de la sérénité et de la délivrance. Tout le pays est accroché à votre souffle qui ne s’éteindra jamais.

En l’absence d'homme, y aurait il une femme, sortie de l'école de Bourguiba, et non voilée?

Mohamed Jegham
Retraité