News - 05.01.2020

Samir Gharbi: A la recherche des ministres nominés…

Samir Gharbi : A la recherche des ministres nominés…

Les réseaux sociaux fourmillent de «CV» et de «bio» des personnalités nominées dans le premier gouvernement Habib Jemli. Chacun y va de sa propre touche, mais quand je parcours ses titres «accrocheurs», je ne trouve que quelques lignes (qui se répètent selon le procédé «copier-coller», souvent sans précision d’âge…

La faute à qui? A l’absence d’une «base de données», a soupiré le Chef de gouvernement en herbe dans sa prestation devant les journalistes le 1er janvier? Moi, je dis: A l’absence d’une communication officielle comme il se doit dans un pays évolué: les services de la «Présidence du gouvernement» se doivent de fournir à tous les médias et aux citoyens l’information de base nécessaire et minimale: la fonction (avec un intitulé complet), le nom et prénom (orthographe officielle), l’âge et la carrière en bref.

Rien de tout de cela dans notre pays depuis 2011, mais je dois reconnaitre que le portail de Youssef Chahed le fait désormais sur son site, mais de façon inexploitable(*) (**).

Faute de communication officielle, les médias s’égarent et égarent leurs lecteurs et auditeurs. Je me souviens d’un temps où, entre autres, le quotidien « La Presse » publiait dès le lendemain de la nomination d’un gouvernement ou d’un remaniement le « CV officiel » de tous les ministres… Pas besoin de courir à droite ou à gauche, il ne reste plus aux journalistes que de « creuser » davantage en interrogeant les personnes concernées ou leur entourage familial, professionnel, amical...

Aujourd’hui, certains s’aventurent en affirmant que le parti Ennahdha s’est attribuée la « part du lion » dans la nouvelle formation en s’arrogeant des postes clés : Justice, Intérieur, Domaines de l’Etat, Jeunesse et Sport… et que sais-je encore ? Vrai ou faux, la vérité éclatera d’elle-même dans les quelques jours qui suivront la mise en œuvre du programme gouvernemental, les débats parlementaires, le comportement des uns et des autres…

Ce qui rend les gens impatients et curieux, c’est le dilettantisme avec lequel les élus du peuple prennent leur travail en considération. Là où il faut un jour ou quelques heures pour réunir les parlementaires et voter (ou non) la confiance au nouveau gouvernement, chez nous cela prend beaucoup de temps, le temps de chauffer la marmite. Le 1er janvier, le chef du gouvernement en charge a présenté enfin sa « liste », après un mois et demi d’efforts laborieux (il a été désigné le 15 novembre). Son travail étant fini, le chef de l’Etat, qui était déjà au courant bien avant le public, met un jour de plus pour recevoir le président du parlement (qui était lui aussi déjà au courant), lui remettre la liste et s’en aller en promettant une réponse pour demain… Un jour après, le 3 janvier, ce dernier se donne un jour de plus pour… se concerter avec le bureau de l’assemblée (le 4 à partir de « 11 h »), pour décider à quelle date ils pourront convoquer le parlement dans son ensemble pour statuer sur la liste…

Au total, quatre jours pour prendre une décision qui nécessite – en ces temps modernes – quelques heures… Pourtant, tous savaient qu’il y a urgence en la demeure. Mais tous semblent ignorer que le peuple regarde, que le monde diplomatique nous observent, que les décideurs économiques et les investisseurs vont se mettre à douter de notre sérieux.

Savez-vous que le gouvernement sortant comprend sept postes ministériels vacants (sur 38), que ces postes sont gérés par intérim… ? Parmi eux, des postes ultra-sensibles, comme les Affaires étrangères, la Défense nationale, l’Emploi, la Santé, les Transports, la Coopération internationale, les Domaines de l’Etat… ? Hélas ! Rares sont ceux qui le savent. Pourtant l’info est publique, il n’y a qu’à cliquer sur le « Portail du gouvernement » (http://fr.tunisie.gov.tn/). Plus les dirigeants trainent les pieds, plus les journalistes et les députés ruent dans les brancards…

Le futur chef de gouvernement nous a affirmé que tous les nominés sont des « personnes compétentes, indépendantes, intègres, volontaires ». Qui va oser le démentir ? Moi. Sur un seul point, vérifiable, pour commencer : il a dit à tous les Tunisiens que son cabinet comprend « 40% de femmes ». Moi, je n’ai pas vu de transgenres. J’ai compté – et recompté – 10 femmes sur un total de 42. Selon ma calculette, le pourcentage est de 23,8%. L’écart n’est pas de 1 ou 2%, il est de 16,2%, soit entre 7 femmes en moins.

J’espère qu’il pourra se rattraper lors de prochains remaniements pour atteindre l’objectif « difficile »dont il a parlé le 1er janvier : « la parité » (50/50). Je rappelle que les femmes représentent plus de 50% de la population nationale (50,6%), 40% de la population active et, selon certains indicateurs, elles dépassent largement le nombre des « mâles » dans certaines filières et métiers. La proportion des femmes diplômées ès sciences est de 58%, selon l’Unesco (un des plus forts taux dans le monde). Le moins que l’on puisse dire est qu’elles méritent beaucoup mieux. Mais je rends à César ce qui est à César : Habib Jemli a fait un net progrès par rapport à son prédécesseur. Le cabinet sortant compte seulement 4 femmes sur 31 (12,9%, hors postes par intérim).

Samir Gharbi

(*) Les données qui sont publiées sur un site web officiel doivent, c’est d’usage, être exploitable, c’est-à-dire, que le programmeur du site doit prévoir un mode d’exportation des données sous un format (word, par exemple) qui évite de devoir recopier manuellement une grande liste de données avec les risques d’erreur. Le portail de notre Chef de gouvernement - http://fr.tunisie.gov.tn/ - ne donne pas cette souplesse. Voir capture d’écran ci-dessous.

(**) L’autre problème, lié à ce site officiel, est l’absence d’archives. Chaque chef de gouvernement efface ou détruit les données de son prédécesseur… C’est le cas général des sites officiels tunisiens, celui de la présidence de la Présidence de la République, comme celui des institutions… C’est dramatique de voir nos dirigeants faire pareille chose en empêchant les citoyens de faire de la recherche historique. On détruit la « mémoire », comme on détruit les archives de la Nation et son patrimoine.

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