News - 13.09.2019

Révélations de l'ambassadeur Slaheddine Jemmali en Libye en pleine révolution : Comment Caïd Essebsi avait géré son retour en Tunisie

Révélation suite au décès de l’ancien ambassadeur Slaheddine Jemmali en Libye : Comment Caïd Essebsi avait géré son retour en Tunisie

Il en avait gardé un souvenir inoubliable. L’ambassadeur Slaheddine Jemmali qui vient de s’éteindre était en poste à Tripoli en 2011, au moment du déclenchement de la révolution libyenne. « Face au véritable imbroglio politique, sécuritaire et diplomatique en Libye : quelle attitude doit adopter la Tunisie, nous confiait-il à chaud ? Question subsidiaire, mais non moins importante : comment harmoniser la position officielle, et en faire l’unique ligne de conduite ? Les conditions d’appréciation étaient fort difficiles. Des règles ont, cependant, été immédiatement définies par Caïd Essebsi, arrivé à la tête du gouvernement, le 6 mars 2011. L’orientation était très nette : vigilance absolue et neutralité totale, mais aussi contenir au maximum les uns et les autres, en attendant l’aboutissement de la révolution en cours. Jusqu’où a été cette neutralité ? Difficile à dire, le secret d’Etat n’étant pas encore levé. Avec son habileté coutumière, Essebsi gérait l’avant-scène.

«En gros, avait résumé à Leaders, l’ambassadeur aujourd’hui défunt Slaheddine Jemmali, la Tunisie est passée de l’effet de surprise, sous Mohamed Ghannouchi, à la neutralité qui se voulait équitable entre Kataeb pro-Kadhafi et Thouar, sous Essebsi ». Les principes n’en sont pas divulgués. Mais des analystes avertis les perçoivent clairement. Retiré depuis lors jusqu'à ses derniers jours, dans son magnifique potager à Menzel Bouzelfa, au cœur du Cap Bon, Slaheddine Jemmali ne peut s’y tromper. Ancien secrétaire d’Etat aux Affaires arabes et africaines et ambassadeur à Riyad, Le Caire, Amman et Tripoli, jusqu’à la chute de Kadhafi, il y avait entrevu les cinq lignes suivantes :

  1. observer une totale neutralité avec tous les acteurs de la scène libyenne
  2. éviter de conseiller à la communauté tunisienne en Libye de quitter ce pays et la laisser libre de sa décision tout en la mettant en garde contre les dangers qui pourraient la guetter
  3. se préparer à accueillir tous les Libyens qui chercheraient à trouver refuge en Tunisie
  4. participer à toutes les réunions sur la Libye en s’abstenant de pousser à l’internationalisation ou à «l’arabisation» du conflit interlibyen
  5. s’abstenir de toute alliance militaire avec une quelconque partie interne ou externe sur le conflit interlibyen.
L’ambassadeur Jemmali avait reçu pour instruction de rester en poste et de ne pas le quitter sous aucun prétexte. Jusqu’au 27 août 2011, jour de la chute du régime de Kadhafi. Béji Caïd Essebsi lui donna alors l’ordre de regagner la Tunisie. « C’était en plein mois de ramadan, avait confié l’ambassadeur à Leaders. Je devais prendre toutes les dispositions nécessaires et emprunter la route en voiture vers le poste frontalier de Ras Jedir. Une fois j’aurai franchi la portière, et foulé le sol tunisien, je devais en prévenir par téléphone Sil Béji. C’était à l’heure de la rupture de jeune. C’est ce que j’ai fait ! Il en été fort soulagé, m’adressant ses félicitations pour l’accomplissement réussi de ma mission et l’observation des consignes. C’était pour moi un moment très émouvant. Sa voix était aussi solennelle qu’affectueuse. En vrai chef de la diplomatie, Sil Béji avait géré avec son brio habituel, une séquence très délicate des relations entre la Tunisie et la Libye, veillant à la sécurité de la mission diplomatique. »
 
Paix à leurs âmes!
 
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1 Commentaire
Les Commentaires
HASSEN ZENATI - 14-09-2019 10:49

Je l'ai connu au Caire, où il représentait la Tunisie, alors que je dirigeais le bureau d'une agence internationale d'informations couvrant l'Egypte, le Soudan et la Libye. Il me recevait régulièrement dans son bureau sommairement aménagé pour échanger nos informations sur la situation politique égyptienne qui commençait à se compliquer du fait de l'obstination de Hosni Moubarak et de son épouse de confier son pouvoir à son fils en héritage. Ce qui frappait en lui, c'était sa lucidité et son intelligence dans l'analyse des faits bruts en s'appuyant sur une approche géopolitique et un background historique d'une rare densité. Il entretenait un contact attentif et amical avec les membres de la communauté tunisienne. Il faisait partie de cette catégorie de diplomates tunisiens post-indépendance nourris de patriotisme, savant, discret, modeste et engagé à la fois, qui se sont illustrés dans diverses capitales. Au moment où il nous quitte, qu'il en soit remercié.

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